CASABLANCA: Innover en s'inspirant du vivant, l'idée fait peau neuve, mais elle ne date pas d'hier, ni même d’avant-hier.
Déjà, il y a plus de 5000 ans, l'invention de la roue fut inspirée par l'observation du transport de boule de bouse des scarabées qu’on a qualifié de «bousiers».
Le vivant est riche de 3,8 milliards d’années d’évolution. Du fait de leur formation, les scientifiques sont plus à même de saisir la portée de cette richesse et de mettre à profit ce que les économistes qualifient d'externalité positive. Certains d'entre eux étudient, spécifiquement, le biomimétisme qui s'apparente désormais à une discipline à part entière, et qui consiste à prendre le vivant pour modèle afin de mettre au point des technologies de pointe et des procédés innovants et de plus en plus performants.
Dès lors, certaines espèces sont étudiées pour leurs caractéristiques permettant à la science, grâce à l’observation, d’accomplir des sauts technologiques majeurs.
Prendre l’air au volant
Le Macrobat s’inspire de la morphologie des oiseaux et particulièrement du faucon pèlerin.
Il s’agit d’une voiture volante électrique futuriste fabriquée par la start-up sud-africaine Phractyl ayant pour principale propriété de pouvoir décoller et atterrir à la verticale, tout en étant capable d’emporter une charge lourde et de voler à une vitesse de 180 km/h.
Ou encore le projet d’Airbus Vahana préfigurant le taxi volant des JO 2024 à Paris qui a réalisé un vol d’essai le 14 novembre 2019, à Pendleton dans l’Oregon d’après la vidéo dévoilée par airbus le 4 février 2020.
Le chemin à parcourir avant la commercialisation de ce type d’engin n’est pas à vol d’oiseau.
Selon l’ex-directeur d’Airbus Helicopter, Guillaume Faury, interrogé à l'occasion par nos confrères de l'AFP lors du salon du Bourget 2019, il faudra attendre la fin de la décennie avant d’imaginer une mise sur le marché de ce type de véhicule pour le grand public.
Du Martin pêcheur à la LGV japonais
Eiji Nakatsu est ornithologue et Ingénieur sur la ligne Tokyo Hakata, au Japon, une ligne parsemée de tunnels.
L’observation du monde animal, particulièrement celui des oiseaux, lui a permis de résoudre une difficulté technique à laquelle sont confrontés les ingénieurs du ferroviaire: le changement de pression subi par le train à grande vitesse, entrant ou sortant d'un tunnel.
L’observation du martin-pêcheur, qui plonge dans l'eau pour y chercher ses victimes grâce à la forme de son bec lui permet de passer sans friction et avec fluidité de l'air à l'eau, malgré un changement de pression important.
L’oiseau peut atteindre une profondeur d'un mètre, dans un milieu aquatique plus résistant que l'air, pour y attraper les poissons, et ce, en maintenant sa vitesse en piqué.
Ce bec a inspiré les ingénieurs japonais pour la conception du Shinkansen. Son avant écrasé et inspiré du martin-pêcheur permet de réduire ce que les scientifiques appellent «l'effet piston» lorsqu'il atteint sa vitesse de pointe autour de 300km/h.
Genèse
Pour dessiner les plans de sa machine volante, l’ornithoptère, Léonard de Vinci a copié les ailes de chauves-souris. Plus de quatre cents ans après, Clément Ader a fécondé cette intuition qui avait elle-même été inspirée par l’observation de la nature.
En effet, il avait repris cette idée en faisant décoller pour la première fois un véhicule plus lourd que l’air, l’Avion I. Les winglets, à la fin du siècle dernier, sont ajoutés aux avions de ligne pour réduire les turbulences dans les zones où l'on constate de hautes variations de pression. Elles étaient inspirées des plumes des grands rapaces, s'inscrivant dans la genèse même de l'histoire séculaire de l'aéronotique.
Aujourd’hui, Airbus étudie le vol en V des oies sauvages. Cette configuration pourrait permettre de diminuer la consommation énergétique des avions de près de 10% grâce au phénomène du courant ascendant créé par l’avion de tête.