PARIS: Les touristes sont de retour et l'été s'annonce radieux dans les aéroports parisiens, mais après deux années de vaches maigres liées à la pandémie, l'ampleur de la reprise fait craindre des problèmes logistiques en raison d'une pénurie de personnels.
En un an, le nombre de passagers a triplé dans les aéroports parisiens. Les chiffres du premier trimestre sont "en phase avec nos prévisions, plutôt dans le milieu haut de la fourchette", s'est réjoui Augustin de Romanet, le patron du Groupe ADP, gestionnaire des installations. Mais côté syndicats, on s'inquiète déjà de cette remontée spectaculaire du trafic.
"Il y a eu des départs massifs [d'employés] et on a des secteurs qui sont très limite", explique Daniel Bertone, secrétaire général de la CGT ADP.
L'an dernier, plusieurs accords d'entreprise ont conduit au départ de plus de 1.300 salariés. Les salaires ont également été réduits pour permettre au groupe de traverser la crise avec un retour prévu aux niveaux de 2019 "au plus tard en 2024".
Entre-temps, l'inflation s'est envolée et ADP, qui cherche à recruter autour de 600 personnes pour combler les départs -comme le prévoyaient les accords-, souffre d'un grave manque d'attractivité.
"Les plateformes comme Roissy-Charles-de-Gaulle ne sont pas simples d'accès, il faut venir en voiture, donc on en revient au problème du prix de l'essence", explique Daniel Bertone, qui déplore la quasi-suppression des indemnités kilométriques décidée par la direction.
En outre, les horaires sont souvent décalés.
Prévisions sous-estimées
"Pour l'été, les effectifs ne seront pas au complet", affirme le secrétaire général de la CFE-CGC, Rachid Eddaidj. La pénurie frappe surtout les techniciens de maintenance, chargés de régler les dysfonctionnements sur les passerelles ou dans le tri des bagages.
ADP assure mettre en place de nombreuses actions pour informer les populations des bassins d'emploi entourant les aéroports de l'existence de 4.000 postes à pourvoir sur les plateformes d'Orly et Roissy.
"Effectivement, nous avons des difficultés de recrutement, mais comme toutes les entreprises françaises", a reconnu le DRH du groupe Laurent Gasse. Pour autant, "on est en ligne de marche avec notre plan d'action (...) qui a été calqué sur les prévisions de retour du trafic", a-t-il rassuré.
Mais d'après le président du Syndicat des entreprises de sûreté aérienne et aéroportuaire (SESA), Jean-Baptiste Thélot, "les prévisions en fin d'année n'étaient pas du tout ce qu'on a aujourd'hui".
Si ADP ne gère pas directement les sas de contrôles des passagers et des bagages, autrement appelés PIF (points d'inspection filtrage), il en a la responsabilité et passe des contrats avec des sociétés privées comme Securitas, Brinks ou ICTS pour garantir un passage le plus fluide possible.
- Pagaille à Schiphol -
Or pour M. Thélot, "la reprise d'activité est bien supérieure à ce qui avait été anticipé", notamment depuis le mois de mars. Il y a un différentiel de 30% entre les prévisions d'ADP et le nombre réel de voyageurs, estime-t-il, et "on se le prend en pleine figure".
D'autant que les processus de recrutement sont longs dans la sûreté aéroportuaire, environ quatre mois pour obtenir tous les agréments. La remontée en charge s'anticipe. "On fait le maximum pour que ça se passe le mieux possible", assure le président du SESA mais là aussi, les entreprises ont du mal à attirer des candidats.
Jean-Baptise Thélot estime le déficit de personnel à entre 300 et 500 agents sur les 5.000 que nécessitent des infrastructures comme les aéroports parisiens.
A Amsterdam Schiphol, le retour soudain des voyageurs a déjà engendré d'énormes problèmes logisitiques. KLM a été contraint d'annuler des dizaines de vols le week-end dernier à la demande des autorités aéroportuaires, submergées par le nombre de passagers. Là aussi il manquerait environ 500 agents de sécurité sur un total de 5.000 nécessaires.