AJACCIO : Le réchauffement climatique impacte le goût des clémentines, fruit star de l'hiver consommé de novembre à fin janvier, en diminuant leur acidité, selon les chercheurs de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) basé à San Giuliano en Corse.
Les hausses des températures pendant la maturation des clémentines, en automne, au moment où la lumière nécessaire à la photosynthèse baisse, accélèrent la respiration du fruit qui en vient à puiser dans ses réserves d'acide citrique, explique Olivier Pailly, directeur de l’unité de recherche Inrae sur les agrumes, basée à San Giuliano (Haute-Corse) dans une actualisation d'une recherche publiée début décembre.
Depuis une quinzaine d’années, les chercheurs relèvent une diminution de l’acidité des clémentines, poursuit-il.
Or, "l'acidité est un exhausteur d'arômes. L’équilibre entre acides et sucres est essentiel", détaille le chercheur qui décrit les agrumes comme "les rois de l'accumulation des acides".
"Le réchauffement climatique a un réel impact sur les clémentiniers", conclut l'Inrae qui dispose en Corse d'une collection d'agrumes parmi les plus belles du monde avec plus de 1 100 espèces et variétés différentes.
Plus de 70 variétés de clémentines y sont conservées dans "la première collection mondiale de ressources génétiques de mandarines et clémentines".
La clémentine est née de l’union fortuite d’une fleur de mandarinier et d'oranger douce et elle se distingue de la mandarine par son absence de pépins et son goût plus acidulé. C'est cette acidité qui fonde la typicité de l'Indication Géographique Protégée (IGP) "Clémentine de Corse".
Pour s'adapter au climat du futur, les agronomes cherchent donc "des variétés plus acides et tardives" en "revisitant" des résultats d’essais de variétés de clémentines provenant du monde entier indique M. Pailly.
"Si les changements climatiques s’accentuent, nous serons alors capables de proposer plus rapidement des variétés plus adaptées", explique-t-il, ajoutant que son équipe étudie également l’influence des méthodes agricoles sur l'acidité des fruits.
Les "pratiques plus écologiques" comme l'enherbement des vergers, la fertilisation organique, la conduite de stress hydrique qui revient à réduire les apports d’eau d’irrigation, "favorisent le maintien de la qualité du fruit", l’étalement des récoltes et contribuent à l’adaptation au changement climatique, souligne l'Inrae.
Chaque année, "20 000 à 30 000 tonnes" de clémentines sont récoltées en Corse, selon François-Xavier Ceccoli, producteur et président du groupement Corsica comptoir, qui réunit 70 producteurs, loin derrière l'Espagne, plus gros producteur européen avec 1,3 à 1,4 million de tonnes.