Le secret de la domination saoudienne sur les universités arabes

Quatre universités saoudiennes se sont retrouvées dans le top cinq des institutions académiques arabes dans un palmarès publié récemment. (Photo, réseaux sociaux)
Quatre universités saoudiennes se sont retrouvées dans le top cinq des institutions académiques arabes dans un palmarès publié récemment. (Photo, réseaux sociaux)
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Publié le Lundi 23 août 2021

Le secret de la domination saoudienne sur les universités arabes

  • «Mais il n’y a pas nécessairement une adhésion massive de la part des professeurs plus traditionnels, qui eux sont réticents à abandonner le rôle de conférenciers»
  • Ridge constate l’absence d'enseignement professionnel et de collèges qui offrent une formation dans les domaines techniques et les sciences appliquées

DUBAI : Quatre universités saoudiennes se sont retrouvées dans le top cinq des institutions académiques arabes dans un palmarès publié récemment, ce qui indique que l'investissement dans l'enseignement supérieur porte ses fruits.

L'Université du roi Abdelaziz a récolté la première place dans le classement réalisé par Times Higher Education, suivie par l'Université des sciences et technologies du roi Abdullah à Thuwal et l'Université du Prince Mohammad ben Fahd à Alkhobar, en troisième et quatrième position respectivement. L'Université du roi Fahd du pétrole et des minéraux à Dammam occupe la cinquième place, et l'Université du roi Saoud à Riyad la huitième.

Cet exploit de l'Arabie saoudite ne reflète toutefois pas la situation dans le monde arabe en général, selon des experts. Le Moyen-Orient a encore un long chemin à parcourir pour construire un système d'enseignement supérieur solide et durable, affirment-ils.

Natacha Ridge est la directrice exécutive de la Fondation Cheikh Saoud ben Saqr Al-Qasimi pour les recherches stratégiques à Ras Al- Khaimah, aux Emirats Arabes Unis. Elle rappelle à Arab News que «l'Arabie saoudite a étayé les capacités de recherche de plusieurs institutions, en plus de recruter quelques-uns des meilleurs et des plus brillants universitaires au monde».

«Avec le temps, cet investissement commence à réellement porter ses fruits. Il s'accompagne de l'ouverture du Royaume au tourisme, ce qui signifie, plus généralement qu’il ne constitue plus une enclave isolée, mais bien un pays dynamique et connecté qui peut désormais attirer à la fois des étudiants et des professeurs du monde entier», déclare-t-elle.

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Judith Finnemore, consultante en éducation aux Émirats arabes unis, estime que la réussite de l'enseignement supérieur en Arabie saoudite prend source dans la volonté d'attirer une expertise internationale, et de développer une infrastructure de recherche de qualité. (Photo, AFP/Archives)

 

«Vous pouvez constater que la majorité des universités en Arabie saoudite figurent dans le top 10 de chaque catégorie, ce qui indique une approche exhaustive en ce qui concerne l'enseignement supérieur», explique la directrice.

Judith Finnemore, consultante en éducation aux Émirats arabes unis, estime que la réussite de l'enseignement supérieur en Arabie saoudite prend source dans la volonté d'attirer une expertise internationale, ainsi que le désire de développer une infrastructure de recherche de qualité. Tous des objectifs qui étaient autrefois l'apanage des institutions occidentales.

Selon elle, le Royaume adopte cette approche car il réalise «qu’envoyer les étudiants diplômés dans des universités étrangères ne permet pas de réduire la fuite des cerveaux».

Initialement, les responsables «appréciaient le "produit final", mais ne réalisaient pas les avantages que procurent l'innovation et la recherche» au niveau local.

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L'Arabie saoudite, avec d'autres pays du CCG, pourrait bien devenir la pionnière dans la réalisation de cette ambitieuse entreprise. (Photo, AFP/Archives)

 

Ridge révèle qu’en ce moment, trop d'étudiants se spécialisent dans une poignée de matières telles que l'administration des affaires, et peu se tournent vers les programmes de psychologie et d'éducation, alors que ces secteurs souffrent d’un besoin criant en personnel diplômé.

Ceci résulte en partie du faible investissement dans le domaine de la recherche en sciences sociales, surtout dans les spécialisations qui profitent au secteur public, comme l'éducation, l'urbanisme et la santé publique, pour n’en citer que quelques-uns.

«Nous avons besoin de beaucoup plus de recherches locales sur les problèmes spécifiques à la région, afin que les décideurs politiques puissent agir de manière plus efficace», déclare Ridge.

De plus, une fois les étudiants diplômés, ils quittent souvent l'université sans avoir acquis les compétences recherchées par les employeurs.

Ridge constate l’absence d'enseignement professionnel et de collèges qui offrent une formation dans les domaines techniques et les sciences appliquées.

Selon elle, bien que le personnel universitaire soit souvent bien rémunéré, les longues heures d'enseignement peuvent nuire à d'autres aspects importants de leur travail.

 

CLASSEMENT DES UNIVERSITÉS ARABES 2021

1 Université du Roi Abdelaziz (KSA)

2 Université du Qatar (Qatar)

3 Université des sciences et technologies du roi Abdallah (KSA)

4 Université Prince Mohammad ben Fahd (KSA)

5 Université du roi Fahd du pétrole et des minéraux (KSA)

6 Université Khalifa (EAU)

7 Université des Émirats arabes unis (EAU)

8 Université King Saud (KSA)

9 Université américaine de Beyrouth (Liban)

10 Zewail Cité des sciences et de la technologie (Égypte)

 

«Si certains pays et universités peuvent se permettre de payer des salaires élevés afin d’attirer des professeurs très performants, beaucoup ne le peuvent pas. De plus, ils imposent aux professeurs des charges d'enseignement très élevées, ce qui limite par conséquent le nombre de recherches qu'ils peuvent effectuer», ajoute Ridge.

Elle rappelle que «le classement des universités est affecté quand les professeurs ne publient pas un nombre suffisant d'articles».

Bien qu'il y ait eu d'énormes progrès dans l'adoption de la technologie dans l'enseignement supérieur, Finnemore estime que l'accès à l'apprentissage numérique et aux aides à la recherche est loin d’être universel dans la région.

«Toutes les sociétés ont besoin d'une éducation active à travers l'apprentissage à distance et les applications, et ce à l'échelle mondiale», ajoute-t-elle.

Cette tendance, à l’en croire, en plus d’offrir «un apprentissage concret», est de surcroît bien plus utile à la main-d'œuvre, au lieu de former des hordes de diplômés qui doivent alors tenter de trouver un emploi.

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Ce processus s’avère crucial au moment où les pays du CCG passent vers une économie plus axée sur la connaissance. Avec leur importante population de jeunes et l'avantage de la richesse pétrolière, ils pourraient éviter le «fardeau» des approches éducatives traditionnelles, et créer ainsi un pont entre l'école et la main-d'œuvre qui propulserait les industries devant le reste du monde. (Photo fournie)

 

La qualité et la disponibilité de l'enseignement supérieur continueront sans aucun doute leur progression, en particulier dans les États membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Toutefois, ces pays ne pourront en bénéficier que si un nombre suffisant d'emplois consacré aux diplômés est créé, et si les étudiants eux-mêmes poursuivent des études dans une plus grande variété de disciplines.

«Dans les systèmes (éducatifs) établis depuis un plus grand nombre d’années, comme l'Égypte, la Jordanie et le Liban, l'employabilité des diplômés, ainsi que le nombre d’individus qui poursuivent des études universitaires pour se retrouver ensuite au chômage, continuent de susciter des inquiétudes», révèle Ridge.

Tant que le domaine des études professionnelles n’est pas «solide et valorisé culturellement parlant, les établissements de mauvaise qualité vont continuer de produire des diplômés qui ne pourront donc pas trouver d’emploi. Ils se sentiront déçus de leur avenir, ce qui engendrera des troubles sociaux».

Des indications laissent cependant croire que les étudiants s'adaptent. La pandémie de la Covid-19 par exemple, a contraint les jeunes à se tourner vers des formats d'apprentissage différents.

«Mais il n’y a pas nécessairement une adhésion massive de la part des professeurs plus traditionnels, qui eux sont réticents à abandonner le rôle de conférenciers», note Finnemore.

«Si des structures plus fluides finissent par évoluer, j’y verrai un moyen d'assurer une main-d'œuvre beaucoup plus instruite. Car une approche moins rigide pourrait plaire à une plus grande partie de la population, comme les femmes et les habitants des zones rurales, entre autres», dit-elle.

Ce processus s’avère crucial au moment où les pays du CCG passent vers une économie plus axée sur la connaissance. Avec leur importante population de jeunes et l'avantage de la richesse pétrolière, ils pourraient éviter le «fardeau» des approches éducatives traditionnelles, et créer ainsi un pont entre l'école et la main-d'œuvre qui propulserait les industries devant le reste du monde. «C'est ce qui s'est passé à Singapour entre autres, et vous voyez bien où ils sont aujourd’hui», poursuit Finnemore.

Ridge déclare que «sans établissements d'enseignement supérieur hautement performants, les pays du Moyen-Orient seront contraints de rester dépendants de l'expertise étrangère, qu'elle soit financée par des programmes d'aide ou par leurs propres gouvernements. Ceci n’est ni durable ni efficace pour l’avenir de la région».

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Quatre universités saoudiennes se sont retrouvées dans le top cinq des institutions académiques arabes dans un palmarès publié récemment. (Photo, AFP/Archives)

 

En d'autres termes, l'ensemble du programme de développement durable au Moyen-Orient doit reposer sur les bases solides d'un secteur de l'enseignement supérieur de premier ordre.

L'Arabie saoudite, avec d'autres pays du CCG, pourrait bien devenir la pionnière dans la réalisation de cette ambitieuse entreprise.

L'Université de la Princesse Nourah bent Abdelrahman à Riyad, la plus grande université pour femmes au monde est un bon exemple. Elle est récemment devenue la première université en Arabie saoudite à obtenir l'accréditation qui lui permet de décerner à son personnel la bourse Advance HE, en raison de son Programme d'excellence académique (PEA).

Dirigé par le personnel de son Centre d'excellence en enseignement et en apprentissage, sous l'égide du Décanat du développement académique, PEA s’active pour obtenir l'accréditation depuis trois ans. Le programme a établi une solide équipe au sein d'une communauté croissante de près de 150 000 boursières.

«Nous sommes ravis d'avoir obtenu l'accréditation pour le PEA, un programme de développement professionnel et de reconnaissance», confie à Arab News Ola Elshurafa, la consultante académique et responsable du programme AEP au CETL, et elle-même chercheuse supérieure.

«Cet exploit constitue une étape importante dans notre travail vers l'excellence de l'enseignement à travers le PEA, en reconnaissant et en récompensant l'engagement des individus dans leur développement professionnel continu», dit-elle.

«Nous nous engageons à soutenir les professeurs et le personnel du PEA dans leur cheminement vers une éducation de qualité, à la lumière des normes internationales, dans le but de l'amélioration de l'apprentissage et la réussite des étudiants», conclut-elle.

 

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Twitter : @CalineMalek


Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Nucléaire: le chef de la diplomatie iranienne à Oman pour de nouvelles discussions avec Washington

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  • L'agence de presse iranienne Mehr a diffusé une courte vidéo montrant M. Araghchi descendre d'un appareil officiel iranien à l'aéroport de Mascate
  • M. Araghchi se rendra à Mascate "à la tête d'une délégation composée de diplomates et d'experts techniques" pour mener ces discussions indirectes avec les Etats-Unis, avait auparavant indiqué le porte-parole de son ministère

TEHERAN: Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas  est arrivé vendredi à Oman pour une troisième session de discussions sur le nucléaire avec les Etats-Unis prévue samedi, Téhéran augurant de "possibles progrès" si Washington fait preuve de "bonne volonté, sérieux et réalisme".

L'agence de presse iranienne Mehr a diffusé une courte vidéo montrant M. Araghchi descendre d'un appareil officiel iranien à l'aéroport de Mascate.

M. Araghchi se rendra à Mascate "à la tête d'une délégation composée de diplomates et d'experts techniques" pour mener ces discussions indirectes avec les Etats-Unis, avait auparavant indiqué le porte-parole de son ministère, Esmaïl Baghaï.

Le département d'Etat américain a annoncé que l'émissaire du président Donald Trump, Steve Witkoff, participerait bien à ces pourparlers, dans la foulée des deux précédents rendez-vous à Mascate le 12 avril et Rome le 19, salués comme de bonnes discussions par Téhéran et Washington.

Ce troisième cycle prévoit une session de pourparlers techniques entre experts sur le programme nucléaire iranien, en complément de la négociation diplomatique principale.

Michael Anton, qui occupe le poste de responsable de la planification politique au sein du département d'Etat américain, dirigera les travaux techniques du côté américain.

L'agence de presse iranienne Tasnim a de son côté rapporté que les discussions techniques seront menées côté iranien par les vice-ministres des Affaires étrangères Kazem Gharibabadi et Majid Takht-Ravanchi.

Vendredi, M. Baghaï a déclaré que "pour que les négociations progressent, il faut une démonstration de bonne volonté, de sérieux et de réalisme de la part de l'autre partie".

Dans une interview jeudi, le ministre iranien des Affaires étrangères a déclaré que Téhéran "aborderait les négociations de samedi avec sérieux, et que si l'autre partie fait également preuve de sérieux, des progrès sont possibles".

Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump a relancé sa politique dite de "pression maximale" contre l'Iran, avec qui les Etats-Unis n'ont plus de relations diplomatiques depuis 1980. Il a initié des négociations avec Téhéran, tout en menaçant de bombarder l'Iran en cas d'échec.


Soudan: deux années de guerre et toujours pas d’issue

Les personnes qui ont fui le camp de déplacés de Zamzam après qu'il soit tombé sous le contrôle du RSF, se reposent dans un campement de fortune dans un champ près de la ville de Tawila dans la région du Darfour occidental déchirée par la guerre au Soudan, le 13 avril 2025. (AFP)
Les personnes qui ont fui le camp de déplacés de Zamzam après qu'il soit tombé sous le contrôle du RSF, se reposent dans un campement de fortune dans un champ près de la ville de Tawila dans la région du Darfour occidental déchirée par la guerre au Soudan, le 13 avril 2025. (AFP)
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  • La reprise, le mois dernier, du contrôle de la capitale Khartoum a donné lieu à une petite lueur laissant espérer une issue au conflit
  • Elle a vite été balayée par l’intransigeance des deux parties concernées

PARIS: Depuis le 15 avril 2023, le Soudan est en proie à des affrontements meurtriers entre l’armée soudanaise et les Forces de Soutien Rapide « FSR ».

Le bilan de ces affrontements est très lourd, et s’élève, selon les Nations unies, à plus de 20 mille morts et 14 millions de déplacés.

La reprise, le mois dernier, du contrôle de la capitale Khartoum a donné lieu à une petite lueur laissant espérer une issue au conflit.

Elle a vite été balayée par l’intransigeance des deux parties concernées.

L’armée soudanaise, dirigée par le général Abdel Fatah Al-Burhan, a exigé que les « FSR » déposent leurs armes comme condition préalable à toute négociation.

Malgré leur défaite, les « FSR », menées par le général Mohamed Dagalo, dit Hemedti, n’ont prêté aucune attention à cette proposition.

Elles se sont repliées dans leur province d’origine, le Darfour, située à l’ouest du Soudan, et semblent se préparer à une guerre d’usure.

Selon les informations en provenance du Soudan, elles encerclent la ville d’El-Fasher, capitale de la province.

Si cette ville leur tombe entre les mains, elles contrôleront alors toute la région, ce qui fait dire à certains observateurs que Hemedti pourra, à partir de là, annoncer la formation de son propre gouvernement.

Après avoir été amputé du Sud-Soudan, le pays serait en voie de subir une nouvelle mutilation, puisqu’en février dernier les « FSR » et 24 organisations soudanaises ont signé une charte jetant les bases d’un gouvernement « de paix et d’unité ».

Ce n’est pas l’avis du directeur du Centre d’étude du monde arabe et méditerranéen « EMAM » à Tours, Marc Lavergne, qui doute de cette hypothèse.

Selon lui, « On ne voit pas très bien quel est l’élément qui peut souder ce mouvement », car chacun des groupes qui le constituent « lutte d’abord pour ses objectifs propres ».

Pas de lumière au bout du tunnel

Cette coalition, qui s’est regroupée autour des « FSR », a réussi à agréger beaucoup d’éléments de la société civile, ceux qui ont mené la révolution pacifique depuis avril 2019.

Mais cette coalition est des plus hétéroclites, indique Lavergne, puisqu’il y a en son sein « toutes sortes de formations, de partis politiques ou de groupes qui sont eux-mêmes divisés ».

D’autre part, il souligne l’incapacité des « FSR » à gérer une région, et affirme « que le problème de ces forces, c’est qu’elles sont incapables de gérer ce qu’elles gagnent ».

« Elles l’ont montré dans le désert. Elles l’ont montré dans l’est du Soudan », ajoute-t-il, à « force de tuer, de violer et puis de vivre sur l’habitant parce qu’ils n’ont pas de casernes, ils n’ont pas où loger ».

Pour Lavergne, « elles ne peuvent pas gagner, mais elles peuvent résister », et peuvent, par conséquent, « servir d’idiots utiles aux forces démocratiques. C’est un peu ce que j’imagine ».

Paradoxalement, du côté de l’armée, « il y a quand même cette solidité et cette discipline, qui lui ont permis de gagner du terrain très progressivement », mais « c’est une armée qui possède un pays et non pas un pays qui possède une armée ».

Ce modèle, indique Lavergne, est rejeté par « les démocrates, les intellectuels, et par toutes les forces non armées, qui n’ont pas d’armes, violemment réprimées » pendant « le printemps soudanais ».

La chute de Khartoum, estime-t-il, « c’est aussi la chute de toutes ces catégories de Soudanais modernes, si l’on veut, enfin tournés vers l’Occident, vers les idées de démocratie et de liberté », qui ont fait le choix de se regrouper autour des rebelles du Darfour.

Ce qui surprend ce fin connaisseur du Soudan, « c’est l’incapacité des Soudanais à s’entendre », et c’est pour ça que l’armée prend le pouvoir à chaque fois.

Pour conclure, Lavergne concède à regret qu’il n’y a pas de lumière au bout du tunnel pour l’instant, mais que le Soudan, pays riche en ressources naturelles et minières, pouvait s’éviter de nombreux malheurs.

Il fallait ouvrir des routes, créer des institutions, former les jeunes, développer des industries locales, « des choses à faire qui n’ont pas été faites mais qui ne sont pas compliquées à faire. Mais je pense que c’est un peu tard ».


1985 – Un prince saoudien dans l’espace: une première historique

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  • La une d’Arab News a retracé le parcours du prince Sultan, célébrant ce moment historique que le monde arabe a qualifié de «jour de fierté»
  • Au cours de dix semaines d'entraînement intensif en Arabie saoudite et à la Nasa aux États-Unis, le prince Sultan est passé du statut de pilote de la Royal Saudi Air Force à celui d'astronaute

RIYAD: Le 17 juin 1985, l’Arabie saoudite a marqué l’histoire lorsque la navette spatiale Discovery de la Nasa a décollé de Cap Canaveral, en Floride, pour sa cinquième mission. À son bord se trouvait le premier astronaute arabe, musulman et membre d’une famille royale – un événement symbolisant l’aube d’une nouvelle ère pour l’exploration spatiale dans le monde arabe.

Le prince Sultan ben Salmane, pilote de l'armée de l'air royale saoudienne âgé de 28 ans, a passé sept jours à mener des expériences dans l'espace au sein d'un équipage international composé de sept personnes.

Pendant le voyage de Discovery, le prince, deuxième fils du roi Salmane d'Arabie saoudite, a également surveillé le déploiement d'Arabsat-1B, le deuxième satellite lancé par l'Organisation arabe de communication par satellite, conçu pour stimuler les communications téléphoniques et télévisuelles entre les nations arabes.

Le leadership de l'Arabie saoudite dans le secteur de l'exploration spatiale régionale a commencé à ce moment-là, préparant le terrain pour les progrès remarquables qui ont suivi et qui ont façonné sa vision.

La confiance dans la capacité du Royaume à mener le voyage du monde arabe dans l'espace a été évidente lorsque les États membres de la Ligue arabe ont désigné le prince Sultan comme spécialiste de charge utile pour voyager à bord de la navette spatiale.

Le Royaume a joué un rôle essentiel dans la création par la Ligue arabe de la société de communication par satellite Arabsat. Son premier satellite, Arabsat-1A, a été lancé dans l'espace par une fusée française en février 1985.

Comment nous l'avons écrit

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La une d’Arab News a retracé le parcours du prince Sultan, célébrant ce moment historique que le monde arabe a qualifié de «jour de fierté».

Au cours de dix semaines d'entraînement intensif en Arabie saoudite et à la Nasa aux États-Unis, le prince Sultan est passé du statut de pilote de la Royal Saudi Air Force à celui d'astronaute, prêt pour une mission au cours de laquelle il serait le plus jeune membre de l'équipage.

Il a été accueilli en héros, tant en Arabie saoudite que dans l’ensemble du monde arabe, lorsque la navette spatiale a atterri sans encombre sur la base aérienne d’Edwards, en Californie, à 6 h 11, heure locale, le 24 juin 1985. Cet événement marquant a inspiré une génération d’Arabes à tourner leur regard vers les étoiles.

Sa propre mission dans le secteur spatial était cependant loin d'être terminée. À son retour, le prince a été promu au rang de major de l'armée de l'air royale saoudienne et, lorsque l'Arabie saoudite a décidé d'accélérer ses efforts d'exploration spatiale dans le cadre de Vision 2030, il n'y avait pas de meilleur choix pour présider la Commission spatiale saoudienne lors de sa création en 2018.

Les efforts du prince Sultan pour former une nouvelle génération d'astronautes saoudiens ont rapidement commencé à porter leurs fruits. Et le 21 mai 2023, le Royaume a célébré une nouvelle étape dans son voyage dans l'espace lorsque la première femme astronaute saoudienne et arabe a pris son envol.

Rayyanah Barnawi a été rejointe par Ali Alqarni, le deuxième Saoudien dans l'espace après le prince Sultan, lors de la première mission du programme de vols spatiaux habités de la Commission spatiale saoudienne. Au cours de leur mission de 10 jours à bord de la Station spatiale internationale dans le cadre de la mission Axiom 2, les deux astronautes saoudiens ont mené 11 expériences de recherche en microgravité.

Un mois plus tard, la commission a été rebaptisée Agence spatiale saoudienne par une résolution du Cabinet. Ses objectifs sont de développer les technologies spatiales, de stimuler la diversification économique, de soutenir la recherche et le développement dans le secteur et de former les futures générations d'astronautes saoudiens.

«Ce pays a été construit pour tant de générations, et chaque génération ouvre la voie à la suivante, et crée la plateforme qui lui permettra de passer au niveau supérieur», a déclaré le prince Sultan lors d'un entretien accordé à Arab News en 2019.

En 2020, l'Arabie saoudite a annoncé l'allocation de 2,1 milliards de dollars (1 dollar = 0,88 euro) à son programme spatial dans le cadre des efforts de diversification décrits dans le cadre stratégique Vision 2030 pour le développement national. Deux ans plus tard, le secteur spatial saoudien a généré 400 millions de dollars de revenus, et ce chiffre devrait atteindre 2,2 milliards de dollars d'ici à 2030.

Au-delà de l'Arabie saoudite, le voyage pionnier du prince Sultan dans l'espace a également inspiré d'autres Arabes de la région. Deux ans plus tard, en juillet 1987, le Syrien Mohammed Faris était cosmonaute de recherche pour une mission de huit jours et de trois personnes à bord d'un vaisseau spatial soviétique à destination de la station spatiale Mir. Accompagné de deux cosmonautes soviétiques, il a mené plusieurs expériences de recherche dans les domaines de la médecine spatiale et du traitement des matériaux.

Hazza al-Mansouri, le troisième Arabe dans l'espace, qui est devenu en septembre 2019 le premier astronaute émirati et le premier Arabe à poser le pied sur la Station spatiale internationale, s'est également inspiré du prince Sultan.

«La passion de Hazza al-Mansouri pour l'espace et son désir d'ouvrir la voie aux générations futures pour l'explorer ont été inspirés par la mission du prince Sultan en 1985», a écrit Mohammed Nasser al-Ahbabi, ancien directeur général de l'Agence spatiale des Émirats arabes unis, dans un article publié en 2020 à l'occasion du 45e anniversaire d'Arab News.  

«En tant que jeune élève, le futur astronaute a découvert, dans son manuel solaire, une photo du prince Sultan, premier Arabe dans l’espace – un moment charnière qui allait transformer sa vie.»

En 1988, le président des Émirats arabes unis de l'époque, le cheikh Zayed ben Sultan al-Nahyane, a rencontré le prince Sultan et l'a interrogé sur tous les détails de son voyage dans l'espace.

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De retour dans son pays, le prince Sultan Salman al-Saoud a été accueilli en héros et nommé major de l'armée de l'air royale saoudienne. (Nasa)

«L'expérience du prince Sultan a eu un impact considérable sur les Émirats arabes unis en particulier, un pays qui a fait preuve d'un engagement fort envers l'espace depuis l'époque de son fondateur et premier président, le cheikh Zayed ben Sultan al-Nahyane», a écrit M. Al-Ahbabi.  

«La vision du cheikh Zayed et l'étape historique franchie par le prince Sultan ont servi de tremplin à l'enthousiasme des Émirats arabes unis et de la région pour l'exploration spatiale.»

L'agence spatiale des Émirats arabes unis a signé un accord avec l'Agence spatiale saoudienne en 2020 afin de renforcer la coopération dans les activités spatiales à des fins pacifiques, de renforcer les capacités techniques et scientifiques et d'échanger des connaissances et de l'expertise.

Alors que la région arabe continue de développer ses projets et ses investissements dans le secteur spatial, on se souviendra toujours du rôle joué par le prince saoudien pour rappeler aux jeunes générations qu'il faut viser les étoiles.

Lorsqu'elles verront la Terre depuis l'espace, elles constateront, comme l'a déclaré le prince Sultan à Arab News en 2019, que «votre intérêt et votre passion pour les choses deviennent plus globaux, plus universels».

Sherouk Zakaria est une journaliste d'Arab News basée aux Émirats arabes unis, avec plus d'une décennie d'expérience dans les médias et la communication stratégique.

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com