Les banques libanaises auraient détourné $250 millions d'aide de l'ONU

Des enfants palestiniens du camp de réfugiés de Chatila à Beyrouth. Plus de 250 millions de dollars d'aide humanitaire des Nations Unies destinée aux réfugiés et aux communautés dans le besoin a été détournée par les banques qui ont vendu de la monnaie locale à des taux très défavorables. (Photo, Shutterstock)
Des enfants palestiniens du camp de réfugiés de Chatila à Beyrouth. Plus de 250 millions de dollars d'aide humanitaire des Nations Unies destinée aux réfugiés et aux communautés dans le besoin a été détournée par les banques qui ont vendu de la monnaie locale à des taux très défavorables. (Photo, Shutterstock)
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Publié le Vendredi 18 juin 2021

Les banques libanaises auraient détourné $250 millions d'aide de l'ONU

  • Les aides ont été perdues au profit des banques qui ont échangé des dollars provenant des agences de l'ONU à des taux en moyenne 40 % inférieurs au taux du marché
  • Confrontés à un système financier désireux d'aspirer autant de dollars que possible, les donateurs ont du mal à créer une approche cohérente qui préserve la pleine valeur de l'aide

BEYROUTH : Au moins 250 millions de dollars d'aide humanitaire des Nations Unies destinée aux réfugiés et aux communautés pauvres du Liban ont été perdus au profit des banques qui ont vendu la monnaie locale à des taux très défavorables, a révélé une enquête de la Fondation Thomson Reuters. 

Les nouvelles des pertes, qualifiées de «stupéfiantes» dans un rapport interne des Nations Unies et confirmées par de multiples sources, surviennent pendant que le Liban est aux prises avec la pire crise économique de son histoire. Plus de la moitié de la population vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale.

Ces pertes découlent d'une chute de la valeur de la livre libanaise depuis que l'économie a commencé à s'effondrer à la fin de 2019, faisant grimper les prix et plongeant de nombreux Libanais dans la pauvreté.

Les taux de change défavorables imposées par les banques libanaises grugent particulièrement le pouvoir d’achat des réfugiés syriens et palestiniens et des Libanais pauvres, qui reçoivent une assistance financière de l'ONU. 

Avant la crise, les réfugiés et les Libanais dans le besoin recevaient un versement mensuel de $27, soit près de 40 500 LL à l’époque, du Programme alimentaire mondial (PAM).

Chiffrée à 100 000 LL par personne aujourd’hui, sa valeur réelle en réalité n’est qu’une fraction de ce qu'elle était auparavant, soit $7 au taux de change actuel.

«Auparavant, le pouvoir d'achat était très bon, nous pouvions obtenir un panier alimentaire acceptable», confie Abou Ahmad Saybaa, un réfugié syrien qui régit une page Facebook consacrée aux défis qui accablent les réfugiés au Liban.

«Mais ce donc ne peut plus nous procurer plus d'un gallon d'huile de cuisson. Il y a une énorme différence dans le pouvoir d'achat», précise le père de cinq enfants, qui vit dans un camp de réfugiés dans le nord-est du Liban depuis 2014.  

La situation affecte leur «santé, mentale et physique», se désole-t-il.

Un responsable de la caisse d’assistance et deux diplomates de pays donateurs confirment qu'entre le tiers et la moitié de toute l'aide en espèces de l'ONU au Liban est engloutie par les banques depuis le début de la crise en 2019. 

Tous deux ont se sont exprimé sous couvert d'anonymat.

En 2020 et au cours des quatre premiers mois de 2021, les banques libanaises ont échangé des dollars provenant des agences de l'ONU à des taux en moyenne 40 % inférieurs au taux du marché, a confié le responsable de l'aide.

Le Liban maintient un taux de change officiel de 1 500 LL pour $1, mais depuis la crise, ceci ne s’applique qu'à une poignée de produits essentiels. 

Toutes les autres importations doivent être achetées à des taux de change beaucoup plus élevés, ce qui entraîne une flambée des prix.

La plupart des pertes concernent un programme d'assistance des Nations Unies créé en 2020. D'une valeur d'environ $400 millions, il fournit à près d’un million de réfugiés syriens au Liban des fonds mensuels consacrés à la nourriture, l'éducation, les transports et la protection contre les intempéries hivernales dans les camps.

Le Liban abrite plus d'un million de réfugiés syriens, dont neuf sur dix vivent dans l'extrême pauvreté, selon les données de l'ONU.

Le pays a reçu au moins $1,5 milliard d'aide humanitaire en 2020.

Une évaluation interne de l'ONU en février estime que près de la moitié de la valeur du programme a été engloutie par les banques libanaises avec lesquels transige l'ONU.

Le document, consulté par la Fondation Thomson Reuters, indique qu'en juillet 2020, «50 %» des donations ont été perdues à cause de la conversion de devises.

L'Association des banques du Liban (ABL), qui représente les banques commerciales du pays, nie avoir utilisé des aides pour augmenter des capitaux. Selon l’organisme, l'ONU aurait pu distribuer ces dons en dollars, ou même négocier un meilleur taux avec la Banque centrale du Liban. 

Un porte-parole de la banque centrale n'a pas répondu à une demande de commentaire sur les taux fournis aux organisations humanitaires.

Le programme de l'ONU de $400 millions, connu sous le nom de LOUISE, reçoit des financements des États-Unis, de la Commission européenne, de l'Allemagne, du Royaume-Uni, du Canada, des Pays-Bas et de la France, entre autres, selon son site Internet. 

Il comprend le programme alimentaire mondial (PAM), l'agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF).

La Fondation Thomson Reuters a comparé les taux auxquels les banques ont converti les dollars américains en 2020 et 2021 avec ceux du marché pour calculer le montant de l'aide perdue.

Chiffrées à $200 millions environ en 2019 et 2020, elles atteignent en 2021 au moins $40 millions, à ce jour.

Les chiffres sont conformes à l'estimation interne de l'ONU et ont été vérifiés de manière indépendante par un responsable de l'aide.

Un porte-parole de l'UNICEF a déclaré que l'agence était «très préoccupée par le fait que les bénéficiaires reçoivent la valeur totale des transferts en espèces». Elle aurait récemment renégocié pour obtenir un taux proche du taux du marché.

L’ONU tente également les déboursements en dollars pour certains programmes, a dévoilé le porte-parole.

La Banque Libano-Française (BLF), engagée par LOUISE pour fournir l'aide, a refusé de commenter les taux de conversion défavorables, citant un accord de confidentialité.

Elle a également affirmé que les agences auraient pu distribuer l'argent directement en dollars.

Le financement du PAM d'une aide en espèces mensuelle à 105 000 vulnérables Libanais, d'une valeur d'environ $23 millions l'année dernière, a utilisé les mêmes taux de change défavorables, a indiqué un porte-parole. Ce qui signifie que jusqu'à la moitié des fonds ont été perdus au profit des banques.

Le PAM et le HCR ont renvoyé la Fondation Thomson Reuters au bureau du coordinateur humanitaire des Nations Unies, qui a refusé de commenter les raisons des pertes énormes.

Un porte-parole de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) confie qu'entre le tiers et la moitié de l'aide qu'elle a distribuée depuis octobre 2020, environ $7 millions, a été perdue à cause de la conversion de devises. Pourtant, l'agence a mis en garde à plusieurs reprises contre le manque de financement.

Les pertes documentées des programmes LOUISE, PAM et UNRWA s'élèvent à au moins $250 millions depuis octobre 2019.

À la suite des pressions exercées par les agences onusiennes, les écarts entre le taux de change moyen du marché et le taux proposé par les banques se sont réduits, mais n'ont tout de même pas disparu.

Confrontés à un système financier désireux d'aspirer autant de dollars que possible, les donateurs et les agences des Nations Unies ont du mal à créer une approche cohérente qui préserve la pleine valeur de l'aide.

En mai, un haut responsable de la Banque mondiale a déclaré que le Liban avait accepté de verser l'aide d'un prêt de 246 millions de dollars de la Banque mondiale aux Libanais pauvres directement en dollars, mais les paiements ont été retardés.

La dollarisation de l'aide, qui a été recommandée dans l'évaluation interne de février et réclamée par les pays donateurs et les analystes indépendants, permettra de conserver la pleine valeur des dons pour les bénéficiaires sans tenir compte des fluctuations des taux de change. 

Mais les autorités libanaises ont résisté aux efforts de dollarisation des flux d'aide, alors qu'elles cherchent à maintenir le contrôle sur l'une des rares sources de devises fortes restantes.

Pendant ce temps-là, les pays donateurs sont devenus de plus en plus impatients en raison des millions des contribuables perdus par les banques.

«Nous sommes plus que prêts à investir afin d’aider les gens, mais nous avons besoin d'une contrepartie crédible qui ne va pas empocher de l'argent dont nous sommes tenus pour responsables dans nos propres pays», a dénoncé un diplomate occidental sous couvert d'anonymat.

Jad Chaaban, professeur d'économie à l'Université américaine de Beyrouth, rappelle que les organisations internationales au Liban n’ont pas beaucoup de marge de manœuvre pour faire des compromis dans un environnement politique difficile et respecter des normes de responsabilité.

«C'est inacceptable, il faudrait établir des normes beaucoup plus strictes. Nous voyons effectivement la même dynamique que des entrepreneurs ou des hommes d'affaires qui détournent l'argent reçu pour la construction d’une école ou d’un projet d'infrastructure», a expliqué Chaaban.

«En ce moment, chaque centime compte pour le Liban», tonne le professeur.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


France: forte contraction de l'activité du secteur privé en novembre, selon l'indice PMI Flash

Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors du forum d'affaires trilatéral France-Italie-Allemagne à Paris, le 22 novembre 2024. Le Forum trilatéral, qui en est à sa sixième édition, réunit les associations professionnelles MEDEF, Confindustria et BDI des trois pays, qui représentent les secteurs industriels des plus grandes économies européennes. (AFP)
Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors du forum d'affaires trilatéral France-Italie-Allemagne à Paris, le 22 novembre 2024. Le Forum trilatéral, qui en est à sa sixième édition, réunit les associations professionnelles MEDEF, Confindustria et BDI des trois pays, qui représentent les secteurs industriels des plus grandes économies européennes. (AFP)
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  • "De très nombreuses entreprises interrogées ont imputé cette baisse de l'activité globale à la faiblesse de la demande" de la part des entreprises et des ménages, indique le communiqué
  • "Les données de l'enquête indiquent une accélération de la contraction, tant dans le secteur des services que dans l'industrie manufacturière en milieu de quatrième trimestre", soulignent S&P et HCOB

PARIS: L'activité du secteur privé français a enregistré en novembre sa plus forte contraction depuis janvier, avec un indice PMI Flash en recul pour le troisième mois consécutif, indiquent vendredi l'agence S&P Global et la Hamburg Commercial Bank (HCOB), qui calculent cet indice.

Le PMI Flash s'est établi à 44,8 en novembre, au plus bas depuis dix mois, contre 48,1 en octobre.

"De très nombreuses entreprises interrogées ont imputé cette baisse de l'activité globale à la faiblesse de la demande" de la part des entreprises et des ménages, indique le communiqué.

"Les données de l'enquête indiquent une accélération de la contraction, tant dans le secteur des services que dans l'industrie manufacturière en milieu de quatrième trimestre", soulignent S&P et HCOB.

La production a ainsi "fortement baissé" dans le secteur manufacturier, avec un taux de contraction le plus élevé depuis décembre 2023. Les fabricants attribuent cette baisse de l’activité à plusieurs facteurs, dont la faiblesse des secteurs automobile, cosmétique et du BTP, ainsi qu’une conjoncture morose sur les marchés étrangers.

"Les prestataires de services ont quant à eux mentionné un manque de visibilité économique et politique, se traduisant par une plus grande réticence des clients à engager des dépenses". L'activité "a ainsi enregistré son plus fort recul depuis janvier dernier" dans les services.

Le volume des nouvelles affaires s'est lui aussi contracté en novembre, une baisse qui est "la plus marquée depuis quatre ans". Cette tendance "reflète principalement une forte diminution des nouvelles commandes dans l’industrie manufacturière".

Le recul global des ventes "s’explique également par un très fort repli de la demande étrangère, les tensions géopolitiques et l’affaiblissement de la demande en provenance des Etats-Unis", qui ont entraîné "la plus forte contraction des nouvelles affaires à l’export depuis mai 2020".

Les perspectives d’activité pour les douze prochains mois "sont orientées à la baisse pour la première fois depuis mai 2020" dans le secteur privé en novembre, car de nombreuses entreprises craignent que la faiblesse prolongée de la demande soit synonyme d'une contraction de l'activité au cours de 2025.

Les répondants à cette enquête expliquent leur pessimisme par "le climat d’incertitude actuel, engendré notamment par la morosité de la conjoncture économique", et "par la fermeture d’entreprises et la faiblesse des secteurs de l’automobile et du BTP".

S&P et HCOB relèvent toutefois "une tendance favorable" sur un point: "l'emploi est reparti à la hausse", avec un taux de création de postes à un plus haut depuis six mois, "exclusivement" dû à une augmentation des effectifs dans les services.


450 000 emplois dans le secteur saoudien du divertissement d'ici 2030, selon le ministère de l'Investissement

La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume. (Shutterstock)
La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume. (Shutterstock)
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  • L'Arabie saoudite a délivré 34 permis d'investissement dans l'industrie du divertissement au cours du troisième trimestre de l'année
  • La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume, qui visent à réduire la dépendance du pays aux revenus du pétrole brut

RIYAD: Le secteur du divertissement en Arabie saoudite devrait créer 450 000 emplois et pourrait contribuer à hauteur de 4,2% au produit intérieur brut du pays d'ici à 2030, selon un nouveau rapport.

Dans son dernier communiqué, le ministère de l'Investissement du Royaume indique que l'Arabie saoudite a délivré 34 permis d'investissement dans l'industrie du divertissement au cours du troisième trimestre de l'année, ce qui représente une augmentation de 13% par rapport aux trois mois précédents.

Le ministère a ajouté que le nombre total de permis d'investissement délivrés dans le secteur du divertissement entre 2020 et la fin du troisième trimestre s'élevait à 303.

«Conformément à l’initiative saoudienne Vision 2030, l'Arabie saoudite vise à diversifier son économie et à améliorer la qualité de vie en promouvant le tourisme et la culture saoudienne à l'échelle internationale pour attirer les visiteurs. Le secteur du divertissement est un pilier crucial pour atteindre ces objectifs ambitieux, en se concentrant sur l'amélioration de la qualité de vie à travers diverses activités culturelles et de divertissement», a déclaré le ministère de l'Investissement.

La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume, qui visent à réduire la dépendance du pays aux revenus du pétrole brut, qui dure depuis des décennies.

En 2016, l'Arabie saoudite a créé l'Autorité générale pour le divertissement en vue de stimuler l'industrie du divertissement et des loisirs. Depuis, le Royaume a connu des développements notables, notamment la réouverture de salles de cinéma en 2018.

Selon le rapport, l'Arabie saoudite a délivré 2 189 permis dans le secteur du divertissement au cours des cinq dernières années.

Le Royaume a également accueilli 26 000 événements au cours des cinq dernières années, attirant plus de 75 millions de participants.

Le ministère a ajouté que l'essor du secteur du divertissement catalysait également la croissance du secteur du tourisme dans le Royaume.

Le rapport indique que le nombre de touristes entrants dans l'industrie du divertissement a atteint 6,2 millions en 2023, ce qui représente une augmentation de 153,3% par rapport à 2022.

Les dépenses des touristes entrants dans l'industrie du divertissement ont atteint 4 milliards de riyals saoudiens (1,07 milliard de dollars; 1 dollar = 0,95 euro) en 2023, soit une augmentation de 29,03% par rapport à l'année précédente.

«Le secteur du divertissement est un domaine vital et dynamique du Royaume, agissant comme un catalyseur pour le secteur du tourisme. En accueillant divers événements et activités, il stimule le tourisme et attire les visiteurs, ce qui se traduit par une augmentation des dépenses touristiques et un renforcement de l'économie locale», a déclaré le ministère de l'Investissement.

En 2023, le secteur du divertissement a attiré 35 millions de touristes locaux, soit une augmentation de 17% par rapport à 2022.

Les dépenses des touristes locaux en 2023 étaient de 4,7 millions de riyals saoudiens, ce qui représente une baisse marginale de 8,5% par rapport à l'année précédente.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Black Friday, moment privilégié pour les cadeaux de Noël, réjouit les e-commerçants et désespère les indépendants

Un piéton passe devant un magasin lors du Black Friday à Paris, le 25 novembre 2022. (AFP)
Un piéton passe devant un magasin lors du Black Friday à Paris, le 25 novembre 2022. (AFP)
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  • Une nouvelle opportunité pour faire ses achats de Noël avant l'heure, que saisiront "près de 60% des consommateurs français" cette année, selon une étude du Boston Consulting Group (BCG)

PARIS: Dépassé, le lèche-vitrine des boutiques enguirlandées de Noël? Faire ses cadeaux durant le Black Friday séduit désormais les consommateurs, une tendance mettant au défi logistique les acteurs de la vente en ligne, et désespérant les commerces indépendants.

Loriane, 26 ans, achète ses cadeaux de Noël pendant le Black Friday car "les offres sont plus intéressantes, ça permet de faire de plus beaux cadeaux", justifie auprès de l'AFP la jeune femme, qui travaille au ministère de l’Intérieur. Pareil pour Marlène, 53 ans, salariée d'Orange, qui recherche "les meilleures offres". Son collègue Julien, 42 ans, confirme : "En boutique l’année dernière, les gens se pressaient plus pour le Black Friday qu'à Noël".

Né aux États-Unis, le Black Friday a été introduit en France par Amazon "il y a à peu près 15 ans", rappelle à l’AFP Frédéric Duval, le directeur général d'Amazon.fr.

Une nouvelle opportunité pour faire ses achats de Noël avant l'heure, que saisiront "près de 60% des consommateurs français" cette année, selon une étude du Boston Consulting Group (BCG).

Les consommateurs plébiscitent le "large choix de produits, les prix bas et la livraison rapide", selon M. Duval.

Cet événement commercial est toujours lancé le vendredi après Thanksgiving, et se tiendra cette année le 29 novembre.

- Black Month -

"Aujourd’hui, le plus gros mois pour la consommation, c’est novembre" plutôt que décembre, abonde Marc Lolivier, délégué général de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad), qui juge auprès de l'AFP que ce phénomène "a cinq, six ans".

Evénement devenu phare de la vente en ligne, le Black Friday oblige les logisticiens à s'adapter pour faire face à l'afflux colossal de colis.

A titre d'exemple, en 2022, sur la semaine qui a suivi le Black Friday, La Poste avait livré 13,7 millions de colis. Elle en attend "16 millions en 2024", chiffre Jean-Yves Gras, le directeur général de Colissimo.

Certains entrepôts passent dès le mois de novembre "en trois-huit, sept jours sur sept, le dimanche et la nuit", comme à Cdiscount, décrit à l'AFP son PDG Thomas Métivier.

Les équipes sont massivement reforcées: Amazon recrute ainsi 8.000 saisonniers pour novembre-décembre.

Le défi est également technologique, comme pour Cdiscount, dont le site est visité par 10 millions de clients ce jour-là, contre 17 millions par mois en temps normal. "De loin la plus grosse journée de l’année en termes de trafic et d’achats", ce qui conduit les équipes à réaliser des crash-tests pour éprouver la robustesse de leur site internet, raconte M. Métivier.

Au fil des ans, le Black Friday est devenu une "Black Month", constate Quentin Benault, directeur général délégué de Mondial Relay, qui explique que les commerçants proposent des promotions dès le début du mois de novembre. Un soulagement pour les acteurs de l'e-commerce, car cela leur permet de lisser la charge logistique sur un mois plutôt qu'un seul jour.

- "Ça tue le commerce" -

Mais le Black Friday ne fait pas que des heureux. L’Union des Fabricants (Unifab), qui défend la propriété intellectuelle des industriels, alerte : cette période marquée par une profusion de colis en circulation "est une aubaine pour les contrefacteurs", leurs produits passant plus facilement entre les gouttes des contrôles.

"Plus de 8 millions de jeux et de jouets de contrefaçon ont été saisis par les douanes en 2023, la majorité au moment du Black Friday", rappelle sa directrice générale Delphine Sarfati-Sobreira à l'AFP.

Le Black Friday "tue la notion du commerce", déplore aussi Thibaut Ringo, directeur général d'Altermundi, un réseau de boutiques prônant une consommation responsable. "Le consommateur n’attend qu’une chose : qu'on fasse des remises mais nous, les commerçants indépendants, on ne peut pas s'aligner", se désole-t-il.

La Confédération des commerçants de France s'indigne, elle aussi, et met en garde contre des remises "pouvant être basées sur des prix de référence artificiels" et "des stocks spécifiques de moindre qualité proposés à prix cassés". Contre cette "concurrence déloyale", elle appelle à "mieux protéger [les] petits commerçants, qui font vivre [les différents] territoires".