ALEXANDRIE: Dimanche, un tribunal contrôlé par les Houthis a ajourné le procès d'une mannequin et de sa collègue, qui avaient été enlevées il y a plusieurs mois, en raison de l'absence du juge, a affirmé une source juridique à Arab News.
Lors de l'audience prévue, le juge devait décider d'accepter ou de rejeter les arguments juridiques de la défense présentés par l'avocat de la mannequin.
«Les femmes ont été amenées au tribunal pour le procès, mais malheureusement le juge Oussama al-Junaid n'est pas venu, et le tribunal a décidé d'ajourner le procès à dimanche», a déclaré l'avocat, faisant référence à Intissar al-Hammadi et sa collègue.
L'avocat de la défense de la mannequin demande sa libération sous caution.
Depuis son enlèvement dans une rue de Sanaa au mois de février, Al-Hammadi, âgée de 20 ans, fait face à des accusations de violation des codes vestimentaires islamiques, de trafic de drogue, et de prostitution.
Elle a nié toutes les accusations portées contre elle, et a accusé les Houthis de la punir pour avoir refusé de collaborer avec eux.
Les Houthis ont refusé sa demande, et ont ignoré les appels internationaux pour sa libération, la plaçant en isolement dans un quartier spécial pour «prostituées», une décision qui l'a poussée à tenter de se suicider.
Les Houthis ont interdit à son avocat, Khaled Mohammed al-Kamal, de parler aux médias locaux ou internationaux. Ils ont également remplacé un procureur qui avait ordonné sa libération.
Se référant aux verdicts précédents du juge, les avocats qui suivent l'affaire ont décrit celui-ci comme un partisan de la ligne dure, qui pourrait infliger une longue peine de prison à Al-Hammadi.
EN BREF
Intissar al-Hammadi a nié toutes les accusations portées contre elle, et a accusé les Houthis de la punir pour avoir refusé de collaborer avec eux
«Le juge Oussama al-Junaid est un partisan de la ligne dure, fidèle à la milice houthie. Il y a peu de temps, il a ordonné de couper la main d'un homme accusé de vol», selon une source juridique.
Dans une autre affaire, la Cour suprême dirigée par les Houthis a annulé samedi deux condamnations, dont une peine de mort, contre Asmaa al-Omeissy, une mère de deux enfants qui a été enlevée par la milice après avoir été accusée d’espionnage.
Son avocat, Abdelmajed Sabra, a affirmé à Arab News que la Cour suprême avait annulé deux décisions antérieures prises par la Division spécialisée dans les appels criminels, après avoir accepté un recours, et ordonné à la même Cour de réexaminer l'affaire d'urgence.
Amnesty International a affirmé que les Houthis avaient arrêté Al-Omeissy à un poste de contrôle en octobre 2016, et l'avaient par la suite accusée de collusion avec la coalition arabe. À Sanaa, les Houthis ont convoqué son père et les ont tous deux torturés.
«Leur arrestation a marqué le début d'épreuves horribles: des disparitions forcées, des actes de torture et d'autres mauvais traitements, ainsi que des condamnations à mort à la suite d'un procès manifestement inéquitable», a précisé le groupe de défense des droits humains.
Le tribunal a d'abord condamné Al-Omeissy à mort, mais a ensuite réduit cette peine à quinze ans de prison.
Des groupes de défense des droits humains ont dénoncé l’utilisation par les Houthis d’organismes judiciaires sous leur contrôle, dans le but de punir leurs opposants, ajoutant que la milice n'entendait pas libérer les femmes enlevées.
Dimanche, Majed Fadhail, vice-ministre des Droits humains, a affirmé que les Houthis ne relâcheraient pas la mannequin, et qu’ils utilisaient les tribunaux pour justifier leurs actions à son encontre.
«Ces simulacres de procès sont illégaux», a-t-il affirmé à Arab News. «Les Houthis utilisent les tribunaux à des fins politiques.»
Le procès d’Intissar al-Hammadi intervient dans un contexte où les Houthis intensifient les mesures répressives concernant la morale dans les zones sous leur contrôle.
Certaines personnes ont assuré à Arab News que les Houthis avaient interdit aux chanteurs de participer aux mariages et aux rassemblements en plein air, et qu’ils avaient ordonné de remplacer les chansons par des chants religieux ou des chansons folkloriques, connue localement sous le nom de zawamel.
Au début du mois d’août, un poste de contrôle tenu par les Houthis dans la province occidentale de Hodeidah avait retenu le chanteur yéménite Fouad al-Kibssi pendant huit heures, et avait confisqué son matériel, lui reprochant d'avoir violé l’interdiction de chanter.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com