Le miracle Copte

Comment l'église copte d'Égypte a survécu et a prospéré

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Le 15 février 2015, une vidéo montrant l'exécution sauvage de 21 hommes sur une plage de la Méditerranée, près de Syrte en Libye suscite l’indignation générale.

Vêtus de combinaisons orange, les mains attachées dans le dos, les hommes sont conduits à la mort par les membres masqués et vêtus de noir d'un groupe terroriste qui a fait allégeance à Daesh.

Dans la vidéo, la caméra montre les visages tandis que le chef des terroristes prononce un discours décousu, condamnant les « adeptes de l'église égyptienne hostile ». 

Vingt des hommes sont des Égyptiens, des chrétiens coptes migrants pauvres contraints par les circonstances économiques de la Haute-Égypte rurale à quitter leurs maisons et leurs familles pour chercher du travail en Libye. Ils avaient été enlevés au début du mois de janvier 2015.

Le 21e homme, un travailleur ghanéen qui avait été capturé avec eux, est un chrétien, mais pas un copte. On lui aurait offert la liberté mais il aurait préféré rester avec les autres et partager leur sort.

Les 21 refusent de renier leur foi. Même à genoux, aucun des hommes ne se débat, ne crie ou demande grâce.

Au contraire, ils restent étonnamment calmes, même lorsque leurs ravisseurs les plaquent sur le sable, face contre terre, et leur mettent le couteau sur la gorge.

Ce n'est qu'à ce moment-là qu'ils rompent le silence, offrant une dernière et brève prière en arabe à Jésus-Christ dans leur dernier souffle.

Une semaine après le massacre, les 21 personnes sont déclarées martyrs par le pape Tawadros II, chef de l'Église copte orthodoxe d'Alexandrie.

Les coptes, dont la lignée remonte à l'Égypte ancienne et dont la religion est antérieure à la naissance de l'islam et à son arrivée au pays du Nil, sont au cœur de l'histoire de l'Égypte depuis deux millénaires.

Pourtant, pour de nombreuses personnes vivant en dehors de l'Égypte et de la région proche, cette vidéo sinistre est leur introduction à l'une des plus anciennes églises du christianisme, fondée à Alexandrie par Marc l'Évangéliste vers l'an 49 de notre ère.

Pour les Coptes eux-mêmes, habitués au sacrifice et à la souffrance après des siècles de persécution, l'horreur de la plage n'était qu'un chapitre de plus d’une histoire ancienne qui a commencé comme elle devait se poursuivre, imprégnée de la tradition chrétienne du martyre.

Une foi forgée dans le sacrifice

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L'Archevêque Angaelos, Archevêque de l'Église copte orthodoxe de Londres: « Nous sommes toujours là, sans triomphalisme ni arrogance.»

Le christianisme arrive en Égypte très tôt dans les premiers chapitres de l'histoire chrétienne. Selon les Écritures, Marie et Joseph se sont enfuis en Égypte avec l'enfant Jésus après qu'Hérode le Grand, roi de Judée, eut ordonné le massacre des Innocents, c'est-à-dire l'assassinat de tous les enfants de sexe masculin âgés de deux ans ou moins à Bethléem.

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Une peinture française du XVIIIe siècle représente le massacre des enfants à Bethléem qui a poussé Marie et Joseph à chercher refuge en Égypte pour l'enfant Jésus. (Getty Images)

Sous le règne de l'empereur Néron (54 à 68 après J.-C.), Marc l'évangéliste, que l'on croit né dans l'ancienne cité grecque de Cyrène, près de l'actuelle Shahhat en Libye, diffuse les enseignements du Christ en Afrique.

Il y fonde l'Église copte orthodoxe d'Alexandrie, qui va devenir l'un des cinq sièges épiscopaux, ou zones de juridiction ecclésiastique, de la chrétienté, avec Constantinople, Antioche, Jérusalem et Rome.

La langue copte, qui, après des siècles d'arabisation, ne survit aujourd'hui en Égypte que dans l'usage liturgique de l'Église, est une évolution de la langue parlée en Égypte ancienne. Le nom « copte » dériverait du mot grec ancien désignant l'Égypte, Aigyptos, que les coptes appellent Kyptos.

La tradition chrétienne du martyre, établie si impitoyablement à Rome sous le règne de Néron, poursuit Marc en Égypte. En 68 après J.-C., il est martyrisé lorsqu'une foule païenne lui attache une corde au cou et le traîne dans les rues jusqu'à sa mort.

Près de 2 000 ans séparent les martyres de Marc l'Évangéliste, le fondateur de l'Église copte, et la mort des 21 personnes en Libye, mais chacun est lié à l'autre, non seulement comme l'un des innombrables fils individuels qui composent la trame de l'expérience copte, mais aussi par des liens qui vont au-delà du caractère commun de leurs sacrifices.

Après son martyre en 68, les ossements de saint Marc restent en Égypte jusqu'en 828, date à laquelle une partie au moins est volée à Alexandrie par des marchands vénitiens, qui prennent les restes sous prétexte qu'ils risquent d'être détruits par les autorités islamiques de la ville.

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Marc l'évangéliste, qui a fondé l'Église d'Alexandrie. Venise s’est approprié son symbole, le lion, que l’on peut voir dans cette peinture du XVIIe siècle, après que les Vénitiens ont volé ses os en 828. (Getty Images)

Le vol et l'arrivée des reliques à Venise, qui fait de Marc son saint patron, sont relatés dans deux mosaïques du XVIIe siècle sur la façade occidentale de la basilique catholique romaine Saint-Marc à Venise.

En juin 1968, en réponse à une demande du pape copte Cyrille VI à l'occasion du 1 900e anniversaire du martyre de Marc, le pape catholique romain Paul VI renvoie en Égypte ce que le Vatican décrit comme « une partie des reliques de l'évangéliste ».

De retour en Égypte, l'arrivée de la dépouille à l'aéroport du Caire, le 24 juin 1968, est saluée par le pape copte, les chefs des églises du monde entier et des milliers d'Égyptiens, chrétiens et musulmans. Deux jours plus tard, l'inauguration de la nouvelle cathédrale Saint-Marc, où le coffre contenant les reliques est déposé sous l'autel principal, est suivie par des milliers d'Égyptiens, dont le président Gamal Abdel Nasser.

Le 15 février 2018, trois ans exactement après les décapitations en Libye, une nouvelle église est dédiée à la mémoire des martyrs dans le village d'Al-Aour, dans la province de Minya, en Haute-Égypte, où 15 des hommes ont vécu.

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Les proches des 20 travailleurs migrants libyens assassinés par Daech en Libye prient sur leurs dépouilles lors de leurs funérailles dans l'église des martyrs d'Al-Aour. (Ibrahim Ezzat/AFP)

La construction de l'église des martyrs de la foi et de la patrie est financée par le gouvernement égyptien - un geste d'inclusion non sectaire très apprécié par les coptes d'Égypte.

Les restes des hommes, enterrés dans une fosse commune non loin de l'endroit où ils avaient été tués, ne sont pas retrouvés avant octobre 2017. En mai 2018, les 20 coptes sont ramenés par avion en Égypte, où ils sont accueillis à l'aéroport du Caire par le pape Tawadros II et enterrés dans l'église dédiée à leur mémoire. Le Saint-Synode de l'Église orthodoxe copte exprime ses « sincères remerciements » au président Abdel Fattah El-Sisi et à son gouvernement pour leurs efforts en vue de ce rapatriement.

En septembre 2020, le Ghanéen Matthew Ayariga, dont la dépouille n'a pas été réclamée en Libye, retrouve ses frères dans la mort à Al-Aour.

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Une peinture française du XVIIIe siècle représente le massacre des enfants à Bethléem qui a poussé Marie et Joseph à chercher refuge en Égypte pour l'enfant Jésus. (Getty Images)

Une peinture française du XVIIIe siècle représente le massacre des enfants à Bethléem qui a poussé Marie et Joseph à chercher refuge en Égypte pour l'enfant Jésus. (Getty Images)

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Marc l'évangéliste, qui a fondé l'Église d'Alexandrie. Venise s’est approprié son symbole, le lion, que l’on peut voir dans cette peinture du XVIIe siècle, après que les Vénitiens ont volé ses os en 828. (Getty Images)

Marc l'évangéliste, qui a fondé l'Église d'Alexandrie. Venise s’est approprié son symbole, le lion, que l’on peut voir dans cette peinture du XVIIe siècle, après que les Vénitiens ont volé ses os en 828. (Getty Images)

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Les proches des 20 travailleurs migrants libyens assassinés par Daech en Libye prient sur leurs dépouilles lors de leurs funérailles dans l'église des martyrs d'Al-Aour. (Ibrahim Ezzat/AFP)

Les proches des 20 travailleurs migrants libyens assassinés par Daech en Libye prient sur leurs dépouilles lors de leurs funérailles dans l'église des martyrs d'Al-Aour. (Ibrahim Ezzat/AFP)

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Une église à part

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À l'aube du christianisme, Alexandrie, fondée par Alexandre le Grand vers 332 av. J.-C., est la plus grande ville du Proche-Orient, un colosse du commerce et de la puissance politique et, comme l'a écrit le journaliste et auteur égyptien Abdel Latif El-Menawy dans son livre de 2017 intitulé « Les Coptes », « un carrefour de la civilisation, peut-être juste après Rome en termes de grandeur. »

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Alexandre le Grand, qui a fondé et donné son nom à la ville égyptienne d'Alexandrie, où le christianisme s’ancrera quelque quatre cents ans plus tard. (Getty Images)  

L'Église d'Alexandrie développe rapidement une relation tendue avec Rome, tant dans les conflits séculaires avec les autorités impériales que dans les batailles spirituelles avec l'Église romaine. Toutes deux voient d'un mauvais œil cette nouvelle religion, apparemment chère aux subversifs, aux pacifistes et aux pauvres.

C'est sous le règne de l'empereur Dioclétien (245-313) que les chrétiens sont le plus durement réprimés par l'empire romain, dans le cadre de ce que l'on a appelé la persécution dioclétienne, une purge du christianisme à l'échelle de l'empire qui a particulièrement touché l'Égypte.

Selon un rapport, entre 303 et 311, plus de 600 chrétiens sont tués dans la seule Alexandrie. En 311, dans les derniers moments de la persécution, le patriarche d'Alexandrie lui-même, Pierre, est martyrisé par décapitation.

L'impact de la persécution est tel que le début du règne de Dioclétien devient l'année où commence le calendrier de l'Église d'Alexandrie.

Cependant, la séparation de l'Église d'Alexandrie d'avec Rome est encore plus importante pour l'orientation future du christianisme en Égypte.

Le fossé commence à se creuser en 326, avec l'élection d'Athanase Ier comme évêque copte d'Alexandrie. Nombre de ses combats avec Rome concernent l'arianisme, une doctrine qui préconise que Jésus-Christ n'était pas, en fait, divin, mais soumis à Dieu - anathème pour l'Église d'Alexandrie, résolument hostile à toute position théologique qui réduit la divinité du Christ ou, pire, suggère une séparation entre le Christ et Dieu.

À l'instar de la foi naissante du christianisme, l'Empire romain se déchire et est finalement entièrement divisé en 395. L'Égypte et Alexandrie tombent résolument dans la sphère d'influence de l'Empire d'Orient, ou byzantin, avec sa grande capitale Constantinople.

Les débats passionnés sur la nature du Christ atteignent leur paroxysme en 451 lors du concile de Chalcédoine. Tenu près de Constantinople, ce quatrième concile œcuménique de l'Église chrétienne est convoqué par Marcien, l'empereur romain d'Orient, pour régler les différends concernant la divinité du Christ.

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Le concile de Chalcédoine, qui s'est tenu près de Constantinople en 451, a vu l'Église copte se séparer du reste de la chrétienté en raison d'un différend sur la dimension divine du Christ. (Alamy)

Au lieu de cela, il crée un schisme majeur dans le christianisme qui persiste jusqu'à ce jour. Le concile conclut que le Christ est à la fois de nature divine et humaine, une décision qui, pour les Coptes, diluait la divinité du Christ et constituait une hérésie.

Le concile dépose le pape copte Dioscorus Ier et les évêques qui le soutiennent, et la rupture qui en résulte voit l'Église copte quitter le courant dominant du christianisme.

L'empereur Théodose, successeur de Marcian, exile Dioscorus d'Alexandrie. Les citoyens tentent d'empêcher le remplaçant choisi par l'empereur comme pape copte d'entrer dans l'église d'Alexandrie, ce qui pousse les soldats byzantins à commettre un massacre.

« À maintes reprises au début de l'histoire de l'Église copte, les chrétiens égyptiens se montrent disposés à protéger leurs ecclésiastiques de l'œil vigilant de leurs dirigeants et, en retour, leurs patriarches cherchent à protéger leurs congrégations de la persécution impériale », écrit El-Menawy.

« Le caractère même de l'Église s'est forgé dans le cycle de l'oppression et de la résistance ».

Les divergences théologiques avec Rome resteront la principale préoccupation de l'Église copte d'Alexandrie jusqu'à la veille d'événements sismiques qui, au VIIe siècle, remodèleront toute la région.

En 630, l'empereur romain Héraclius dépêche un autre émissaire à Alexandrie pour éradiquer tout vestige de séparatisme religieux. Le pape copte, le patriarche Benjamin, est contraint de fuir en Haute-Égypte, cherchant refuge dans l'un des monastères proches de Thèbes.

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L'empereur romain Héraclius, dont le règne a vu la montée de l'islam et la perte d'Alexandrie. (Alamy)

L'exil forcé du pape à l'intérieur du pays était devenu une sorte de modèle qui allait se poursuivre jusqu'au XXe siècle.

Mais l'emprise byzantine sur l'Égypte ne durera pas. Alors qu'Héraclius s'inquiète de la désunion entre les chrétiens, une nouvelle force religieuse puissante, qui va bientôt tout balayer, émerge en Arabie.

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Alexandre le Grand, qui a fondé et donné son nom à la ville égyptienne d'Alexandrie, où le christianisme s’ancrera quelque quatre cents ans plus tard. (Getty Images)  

Alexandre le Grand, qui a fondé et donné son nom à la ville égyptienne d'Alexandrie, où le christianisme s’ancrera quelque quatre cents ans plus tard. (Getty Images)  

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Le concile de Chalcédoine, qui s'est tenu près de Constantinople en 451, a vu l'Église copte se séparer du reste de la chrétienté en raison d'un différend sur la dimension divine du Christ. (Alamy)

Le concile de Chalcédoine, qui s'est tenu près de Constantinople en 451, a vu l'Église copte se séparer du reste de la chrétienté en raison d'un différend sur la dimension divine du Christ. (Alamy)

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L'empereur romain Héraclius, dont le règne a vu la montée de l'islam et la perte d'Alexandrie. (Alamy)

L'empereur romain Héraclius, dont le règne a vu la montée de l'islam et la perte d'Alexandrie. (Alamy)

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La montée en puissance de l’islam

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En l’an 640, l’un des généraux les plus puissants de l’islam, Amr ibn al-As, réussit à conquérir Alexandrie, au profit du califat Rachidoune et, l’année d’après, toute l’Égypte fut cédée aux musulmans.

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La mosquée d'Amr ibn al-As qui doit son nom au général de l’armée islamique qui a conquis Alexandrie. Considérée comme la première mosquée construite en Égypte, en 642, elle aurait été érigée sur le site de sa tente de campagne. (Shutterstock)

Deux siècles après leur rupture historique avec l’Église romaine, les coptes d’Égypte font désormais face à une nouvelle réalité: leur nombre, leur langue et l’influence de leur foi diminuent progressivement.

À l’époque des conquêtes arabes, les populations majoritaires en Syrie, en Égypte et en Irak sont chrétiennes. Beaucoup se convertissent à l’islam par vagues successives, même si, comme le note M. El-Menawy, «les premières conquêtes islamiques ne s’accompagnaient pas d’une envie fanatique de convertir le monde à l’islam».

Au début, ceux qui adoptaient la nouvelle foi «n’étaient pas obligés de se convertir, tandis que les chrétiens restants, représentés par diverses confessions, vivaient comme des dhimmis – des citoyens non musulmans d’un État sous gouvernance islamique – même si ce n’était, en aucun cas, un terme péjoratif au début de l’empire arabe.»

Néanmoins, la vitesse et l’étendue de l’arabisation des territoires conquis en termes de langue, de religion, de gouvernement et de culture étaient stupéfiantes.

En 706, le gouverneur arabe Abdallah ibn Abdel Malik ordonne l’utilisation de l’arabe comme seule langue officielle. Entre le Xe et le XIIIe siècle, la langue copte, extension directe de l’égyptien ancien tardif, commence à s’estomper du langage courant. L’arabe devient alors la lingua franca de l’Égypte.

Le copte n’a survécu que dans les établissements et les écoles religieuses de l’Église et s’est retiré dans les monastères, où il survit à ce jour en tant que langue liturgique, à peu près de la même manière que le latin est encore utilisé par l’Église catholique.

Au début, les coptes ont servi la classe dirigeante islamique en tant qu’administrateurs principaux, conformément au pacte d’Umar, un traité islamique qui énonce les droits et les restrictions pour les religions abrahamiques non musulmanes sous la domination islamique.

Cependant, malgré ces dispositions, les califes omeyyades et abbassides ont maltraité les minorités. Kurrah, le gouverneur d’Égypte sous le calife omeyyade Al-Walid I (705-715), a décrété que les moines devaient avoir le nom de leur monastère et la date marqués sur les mains ou risquaient l’amputation d’un membre.

Bien que la plupart des Égyptiens aient choisi de rester chrétiens au cours des premières décennies de l’occupation islamique, des colons arabes ont commencé à s’installer dans la région et, avec le temps, les conversions constantes à l’islam ont afflué.

Au Xe siècle, le nombre d’Égyptiens maîtrisant le copte diminue de manière alarmante et, pour préserver leur religion, les évêques coptes commencent à prêcher en arabe

Parfois, l’utilisation de l'arabe était imposée. Al-Hakim bi-Amr Allah, sixième calife fatimide (996-1020), interdit de parler copte en public, chez soi et même à l’intérieur des églises et des monastères. Ceux qui étaient surpris en train de converser en copte se faisaient couper la langue.

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Le sixième calife fatimide du XIe siècle, Al-Hakim bi-Amr Allah, a ordonné de couper la langue de toute personne parlant copte. (Alamy)

Les mesures d’imposition sont un facteur majeur qui pousse les gens à se convertir à l’islam en Égypte.

La jizya était une taxe que les non-musulmans dans tous les pays sous domination islamique devaient payer, au lieu de faire leur service militaire et en récompense de la protection que leur fournissaient les armées musulmanes.

Sans surprise, alors que de plus en plus de dhimmis commencent à se convertir à l’islam, un problème se pose: les revenus provenant d’un grand nombre de non-croyants qui payent des impôts commencent à se tarir.

Plus d’impôts sont imposés, ce qui provoque une série de rébellions aux VIIIe et IXe  siècles jusqu’à ce qu’en 831, un soulèvement majeur éclate dans le delta du Nil. Les coptes de Bachmour, au nord, tiennent le plus longtemps, avant d’être finalement écrasés. Les survivants sont «exilés, emprisonnés ou réduits en esclavage dans tout l’empire», écrit M. El-Menawy. Cela marque alors un tournant dans les relations entre musulmans et chrétiens.

«Fatigués des révoltes, qui étaient alors devenues un fardeau pour l’empire, les Arabes remplacent tous les chefs coptes des provinces et des villages égyptiens par des musulmans, renforçant la domination islamique sur le pays.»

Pourtant, lorsque les croisés sont arrivés dans la région, 500 ans après la conquête arabe initiale, les coptes n’ont montré aucune sympathie ni volonté de coopérer avec leurs frères chrétiens.

La domination arabe en Égypte prend fin en 1250 lorsque les Mamelouks, une classe de guerriers musulmans composée à l’origine d’esclaves du Caucase, renversent la dynastie ayyoubide au pouvoir. L’Égypte reste aux mains des Mamelouks jusqu’en 1517, date à laquelle une nouvelle puissance émerge en Asie Mineure. L’Égypte devient une province ottomane, gouvernée par les Turcs pendant les 300 années qui ont suivi.

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Les mamelouks, une dynastie redoutée de guerriers musulmans originaires du Caucase, ont régné sur l'Égypte pendant trois cents ans avant d'être remplacés par les Ottomans en 1517. (Getty Images)

C’est sous le gouverneur ottoman d’origine macédonienne, Mohammed Ali, qui a gouverné l’Égypte comme son propre royaume dans la première moitié du XIXe siècle, que l’Égypte moderne commence à prendre forme.

Elle voit le jour, cependant, sous les auspices d’un nouveau suzerain impérial dans le plus grand empire que le monde ait jamais vu.

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La mosquée d'Amr ibn al-As qui doit son nom au général de l’armée islamique qui a conquis Alexandrie. Considérée comme la première mosquée construite en Égypte, en 642, elle aurait été érigée sur le site de sa tente de campagne. (Shutterstock)

La mosquée d'Amr ibn al-As qui doit son nom au général de l’armée islamique qui a conquis Alexandrie. Considérée comme la première mosquée construite en Égypte, en 642, elle aurait été érigée sur le site de sa tente de campagne. (Shutterstock)

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Le sixième calife fatimide du XIe siècle, Al-Hakim bi-Amr Allah, a ordonné de couper la langue de toute personne parlant copte. (Alamy)

Le sixième calife fatimide du XIe siècle, Al-Hakim bi-Amr Allah, a ordonné de couper la langue de toute personne parlant copte. (Alamy)

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Les mamelouks, une dynastie redoutée de guerriers musulmans originaires du Caucase, ont régné sur l'Égypte pendant trois cents ans avant d'être remplacés par les Ottomans en 1517. (Getty Images)

Les mamelouks, une dynastie redoutée de guerriers musulmans originaires du Caucase, ont régné sur l'Égypte pendant trois cents ans avant d'être remplacés par les Ottomans en 1517. (Getty Images)

Diviser pour mieux régner

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En 1882, bien que l’Égypte soit théoriquement une province ottomane jusqu’en 1914, le pays est entièrement sous le contrôle des Britanniques, dont l’occupation durera jusqu'en 1956.

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Des troupes britanniques posent près du Grand Sphinx de Gizeh après le bombardement d'Alexandrie par les navires de la Royal Navy en 1882, qui a détruit de grandes parties de la ville antique. (Getty Images) 

Les historiens marquent le début du XIXe siècle en Égypte comme une période d’harmonie entre les coptes et la majorité musulmane et de nombreux exemples en témoignent. Le gouvernement accorde des subventions aux écoles théologiques coptes et, lorsque les coptes ne réussissent pas à remporter des sièges dans les conseils locaux, il intervient pour en nommer quelques-uns, afin que les coptes soient représentés.

En 1855, la jizya est abolie et, sous la modernisation d’Ismail Pacha, petit-fils de Mohammed Ali et du khédive ottoman (vice-roi) d’Égypte de 1863 à 1879, des coptes sont recrutés au sein du conseil consultatif des représentants et d’autres branches de la bureaucratie égyptienne.

Il y avait, écrit M. El-Menawy, «de nombreux exemples illustrant les affinités entre les deux confessions, notamment lors des célébrations religieuses. Les coptes aidaient souvent à construire des mosquées tandis que les musulmans restauraient des églises». Les musulmans et les coptes «avaient en commun de nombreuses qualités et perspectives sur la vie».

Et, pourtant, «au cours du XXe siècle, les deux pôles de la nation commencent à se séparer».

Ce n’est pas un hasard que la désunion croissante coïncide avec la période de domination britannique en Égypte, qui a commencé en 1882, et a suivi la stratégie coloniale classique de «diviser pour mieux régner, semant délibérément le mécontentement entre musulmans et coptes».

En conséquence, «dès le début du XXe siècle, le mouvement national contre l’occupation britannique s’intensifie et, en même temps, le fossé se creuse entre musulmans et coptes».

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Le simulacre de procès et la pendaison expéditive par les Britanniques de quatre Égyptiens du village de Denshawei, dans le delta du Nil, en 1906, ont tendu les relations entre coptes et musulmans. En 1909, le premier ministre copte Boutros Ghali, qui dirigeait les cinq juges, est assassiné par un nationaliste.

De plus en plus, les forces révolutionnaires commencent à s’unir contre l’occupation britannique pour des raisons nationalistes, en particulier après la Première Guerre mondiale, qui a fait des ravages en Égypte.

«Les répercussions de la Première Guerre mondiale sur l’Égypte sont considérables», déclare Michael Akladios, fondateur et directeur d’Egypt Migrations, un projet culturel et archivistique copte mis en place au Canada en 2016 pour préserver les histoires des migrants égyptiens.

«Cela met en évidence la fragilité de la puissance britannique et la nécessité de briser le joug britannique en Égypte.»

Le pays est géré par les Britanniques comme une colonie à part entière. Le nom, les bâtiments, les biens, les animaux et les citoyens ont tous été réquisitionnés pour soutenir l’effort de guerre. Au moins 1,5 million d’Égyptiens ont été enrôlés dans le Corps de travail égyptien, puis soumis à des conditions horribles en Palestine, à Gallipoli et sur le front occidental en France.

Après la guerre, les Égyptiens étaient prêts à s’autogouverner. Les Britanniques, cependant, ont arrêté des dirigeants nationalistes, les envoyant en exil, ce qui a poussé davantage la population aux émeutes et aux troubles.

Enfin, en 1919, une révolution éclate, unissant temporairement musulmans et coptes pour une cause commune. Sous la direction du ministre musulman Saad Zaghloul, les révolutionnaires adoptent le slogan «Unité du croissant et de la croix».

Bien que les Coptes ne représentaient qu’environ 10% de la population, leurs aspirations étaient liées à celles de leurs compatriotes musulmans. Les cheikhs d’Al-Azhar appelaient à la révolution dans les églises et les prêtres prêchaient le soulèvement dans les mosquées.

Le 28 février 1922, après des années de troubles dans tous les recoins de la société égyptienne, le gouvernement britannique publie la Déclaration unilatérale d’indépendance égyptienne, reconnaissant l’Égypte comme un État souverain indépendant.

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Chrétiens et musulmans ont été déclarés citoyens égaux, mais l’indépendance égyptienne était conditionnelle. La Grande-Bretagne a conservé son influence dans la vie publique égyptienne, gardé un grand nombre de troupes dans le pays et conservé le contrôle du très important canal de Suez.

Pire encore, déclare M. Akladios, alors que la montée du fascisme en Europe au cours des années 1930 radicalise progressivement la politique en Égypte, «la monarchie sous contrôle britannique commence à s’aligner sur la majorité islamiste afin de cimenter son pouvoir dans ce climat politique tendu»

Le résultat le plus évident fut la modification en 1934 de l’édit de réforme impérial ottoman de 1856, qui avait introduit des réformes généralisées dans toute la société en vue d’éradiquer la discrimination contre les minorités religieuses et ethniques, y compris les coptes. Le soi-disant décret Al-Ezabi est revenu sur ces réformes et a établi dix conditions qui devaient être remplies avant que toute demande de construction d’une église chrétienne puisse être soumise.

«Ces dix conditions visaient vraiment à limiter la capacité des coptes dans la sphère publique, à restreindre la construction d’églises et à réduire les affectations à des postes politiques et gouvernementaux. C’est à ce moment-là que le processus de marginalisation des coptes au sein de la société égyptienne commence», poursuit M. Akladios.

Pourtant, le pouvoir de la monarchie a été encore plus érodé par la montée du nationalisme pendant la Seconde Guerre mondiale. Une fois de plus, le pays est inondé de troupes britanniques et, entre 1941 et 1943, il est transformé en champ de bataille pour lutter contre l’Afrika Korps allemand.

Pour de nombreux Égyptiens, l’indépendance de façade n’est devenue que trop apparente en février 1942 lorsqu’au plus fort d’une crise au sein du gouvernement égyptien, le roi Farouk se plie aux exigences britanniques sous la menace d’une arme. Alors que le palais Abdeen au Caire est entouré de troupes et de chars, le dixième dirigeant égyptien de la dynastie de Mohammed accepte de nommer un Premier ministre choisi par les Britanniques.

C’est cependant la défaite lors de la guerre de 1948 contre les Juifs en Palestine qui fait déborder le vase pour un groupe de jeunes officiers de l’armée égyptienne, qui ont imputé cet échec à Farouk.

En 1952, le sentiment nationaliste et antiroyaliste en Égypte, alimenté par des années d’occupation britannique et de ressentiment sur des questions comme le contrôle du canal de Suez, atteint un point critique.

Le 23 juillet 1952, le soi-disant Mouvement des officiers libres organise un coup d’État et renverse le roi. Pour les coptes, une autre période dangereuse de changement est en cours.

C’est l’un des leaders du coup d’État – Gamal Abdel Nasser – qui assure rapidement la direction du nouveau gouvernement. Il devient président en 1956 avec un soutien populaire massif parmi les coptes et les musulmans.

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La nomination de Gamal Abdel Nasser à la présidence en 1956 a été saluée par les coptes et les musulmans, mais ses politiques ont vu le début de l'exode des coptes d'Égypte. (Getty Images)

Nasser exerce une influence considérable sur les coptes, comme l’illustrent les hommages exprimés par le pape Chenouda III. Le président, dit-il, «pensait à une nation sans discrimination entre copte et musulman. Il pensait au pays, pas aux sectes et aux religions».

Pourtant, les politiques de la révolution, en particulier celles de nationalisation et de socialisme, y compris les réformes agraires, n’ont guère aidé les coptes. Rien ne laissait entendre que les lois ciblaient les chrétiens, mais elles paralysaient gravement la bourgeoisie égyptienne, dont les coptes étaient des éléments importants.

Même avant la révolution, dit M. Akladios, «les coptes étaient lentement chassés de la politique égyptienne, établissant leurs propres sociétés de bienfaisance et se tournant davantage vers l’Église. Immédiatement après la révolution, les diplômés coptes ont commencé à émigrer, se rendant au Royaume-Uni, au Canada et aux États-Unis, puisque leur horizon est souvent limité dans les écoles et au sein des professions».

Pourtant, en 1970, avec la fin brutale de l’ère Nasser, à la suite de sa mort prématurée à l’âge de 52 ans et la nomination d’Anouar el-Sadate comme son successeur, les coptes sont à nouveau plongés dans une période de profonde incertitude.

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Des troupes britanniques posent près du Grand Sphinx de Gizeh après le bombardement d'Alexandrie par les navires de la Royal Navy en 1882, qui a détruit de grandes parties de la ville antique. (Getty Images) 

Des troupes britanniques posent près du Grand Sphinx de Gizeh après le bombardement d'Alexandrie par les navires de la Royal Navy en 1882, qui a détruit de grandes parties de la ville antique. (Getty Images) 

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Le simulacre de procès et la pendaison expéditive par les Britanniques de quatre Égyptiens du village de Denshawei, dans le delta du Nil, en 1906, ont tendu les relations entre coptes et musulmans. En 1909, le premier ministre copte Boutros Ghali, qui dirigeait les cinq juges, est assassiné par un nationaliste.

Le simulacre de procès et la pendaison expéditive par les Britanniques de quatre Égyptiens du village de Denshawei, dans le delta du Nil, en 1906, ont tendu les relations entre coptes et musulmans. En 1909, le premier ministre copte Boutros Ghali, qui dirigeait les cinq juges, est assassiné par un nationaliste.

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La nomination de Gamal Abdel Nasser à la présidence en 1956 a été saluée par les coptes et les musulmans, mais ses politiques ont vu le début de l'exode des coptes d'Égypte. (Getty Images)

La nomination de Gamal Abdel Nasser à la présidence en 1956 a été saluée par les coptes et les musulmans, mais ses politiques ont vu le début de l'exode des coptes d'Égypte. (Getty Images)

"Président des fidèles"

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Le 9 mars 1971, environ cinq mois après la mort de Nasser, l'Église copte connaît son propre bouleversement sismique avec la mort du pape Cyrille VI et l'accession du pape Chenouda III.

Dirigeant charismatique, Chenouda déploie de nombreux efforts pour rattacher l'Église copte à la communion mondiale et, en 1973, devient le premier pape copte depuis 451 à rendre visite au pape de Rome.

De retour au pays, cependant, il est rapidement devenu évident que la détermination de Sadate à rejeter le nassérisme et le sécularisme créerait en Égypte une atmosphère hostile pour les coptes. Sadate annonce qu'il est « président des fidèles » et, pour coopter les islamistes, il vide les prisons des prisonniers salafistes.

« Sous Sadate, la religion remplace de plus en plus le nationalisme comme fondement du pays », écrit Samuel Tadros, chargé de recherche au Centre pour la liberté religieuse de l'Institut Hudson, dans son livre de 2013 « Motherland Lost : The Egyptian and Coptic Quest for Modernity ».

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« Le christianisme est ridiculisé quotidiennement dans la presse. Il est tout simplement inévitable que cela aliène les coptes, qui craignent de plus en plus pour leur avenir. Des affrontements ont rapidement lieu. La recrudescence de la violence n'est plus qu'une question de temps. »

En 1972, des tracts distribués à Alexandrie accusent à tort Chenouda de faire du prosélytisme agressif pour convertir les musulmans au christianisme, dans le cadre d'un prétendu complot visant à faire à nouveau de l'Égypte une nation chrétienne.

L'Égypte était une poudrière. Il ne manquait qu'une étincelle, qui arrive en 1972 lorsqu'un pyromane tente de mettre le feu à une petite église chrétienne dans le village d'Al-Khanka, dans la banlieue du Caire. Le dimanche suivant, des manifestants coptes se rassemblent au Caire. Emmenée par des prêtres, la foule se rend à Al-Khanka et célèbre une messe en signe de protestation. Des manifestations anti-coptes éclatent, et des maisons ainsi que des magasins coptes sont incendiés. Le gouvernement accuse des « agitateurs étrangers » d'être à l'origine des troubles.

Le 6 octobre 1973, une coalition d'États arabes dirigée par l'Égypte lance une attaque surprise contre Israël dans le but de récupérer la péninsule du Sinaï et les hauteurs du Golan. Bien que l'Égypte la considère aujourd'hui comme une victoire, la principale ambition de la guerre - à savoir rendre le Sinaï à l'Égypte - échoue.

Sadate n'a d'autre choix que de se tourner vers l'Occident, un changement de cap spectaculaire qui implique de transformer l'Égypte en une économie de marché occidentale, de faire la paix avec Israël et de supprimer les courants islamistes qu'il avait jusque-là encouragés.

Même s’il parvient à ancrer fermement l'Égypte dans la sphère d'influence occidentale, Sadate ne réussit absolument pas à freiner la montée des djihadistes, et la résistance islamiste commence à se durcir.

La violence à l'encontre des coptes commence à s'intensifier. En 1979, des pyromanes attaquent une église au Caire et le 6 janvier 1980, veille du Noël copte, des affrontements sectaires éclatent dans tout le pays et plusieurs églises sont incendiées.

Sadate continue de se montrer indulgent envers les islamistes purs et durs et n'hésite pas à utiliser l'Islam pour asseoir son pouvoir dictatorial. Lorsqu'il présente un amendement constitutionnel pour lui permettre de se présenter à la présidence au-delà de la limite de deux mandats, il adoucit la proposition en y ajoutant un volet faisant de la charia la base de toute loi en Égypte.

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Le pape copte Chenouda III a été contraint de chercher refuge dans le désert lorsque le président Sadate a joué la carte islamiste. (Getty Images)

Le pape copte Chenouda III a été contraint de chercher refuge dans le désert lorsque le président Sadate a joué la carte islamiste. (Getty Images)

La nouvelle terrifie les coptes. Depuis quelques années, le gouvernement fait état de l'application de la peine dérivée de la charia pour l'apostasie - la peine de mort.

Les craintes des coptes ne font qu'augmenter lorsque, le 14 mai 1980, Sadate se lève au Parlement et déclare : « Je suis le président musulman d'un pays islamique. » Dans un discours extraordinaire, écrit Tadros, « il accuse le pape de chercher à établir un État chrétien dans le sud de l'Égypte, à Assiout, et les coptes de vouloir provoquer les puissances étrangères contre l'Égypte. »

Les relations entre Sadate et Chenouda sont totalement rompues.

En mars 1981, le pape prononce un discours furieux du haut de la chaire de Saint-Marc, dans lequel il attaque l'idée d'adopter la charia comme base des lois imposées aux non-musulmans.

Trois mois plus tard, en juin 1981, une flambée de violence sectaire dans le quartier El- Zawya El- Hamra du Caire fait plus de 80 morts parmi les coptes et, en août, trois autres personnes périssent dans un attentat à la bombe contre une église.

Le mois suivant, Sadate annule le décret présidentiel de 1971 reconnaissant Chenouda comme patriarche d'Alexandrie. Le pape est contraint à un exil interne dans le désert de Wadi El-Natroun, comme nombre de ses prédécesseurs depuis l'Antiquité.

Un mois plus tard, le 6 octobre 1981, Sadate meurt, assassiné par une bande de djihadistes lors d'une parade militaire, victime du lest qu'il avait lui-même lâché.

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Une époque dangereuse pour les chrétiens

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Le vice-président Hosni Moubarak, blessé lors de l'assassinat de Sadate, survit à l'attentat et devient le quatrième président de l'Égypte. Il introduit un certain degré de liberté politique et de libéralisation de la politique égyptienne, et petit à petit, Shenouda est autorisé à sortir de l'ombre.

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Sous la présidence d'Hosni Moubarak, le pape Chenouda est rétabli dans ses droits, mais les coptes seront entraînés dans les bouleversements qui suivront son renversement en 2011. (Khaled Desouki/AFP) 

En janvier 1983, le président et le patriarche échangent des vœux pour le Noël copte, qui tombe le 7 janvier.

À cette époque, de nombreux politiciens, journalistes et chefs religieux réclament ouvertement la réhabilitation de Chenouda et finalement, en 1985, Moubarak publie un décret déclarant Chenouda III pape d'Alexandrie et patriarche de l'épiscopat de Saint-Marc.

Mais de nouveaux problèmes se préparent pour les coptes.

L'inefficacité de Moubarak laisse un vide que les islamistes peuvent exploiter. Si, au début de sa présidence, les relations entre coptes et musulmans sont calmes, la tension est toujours présente et la crainte constante qu'un jour, les liens effilochés entre chrétiens et musulmans ne se brisent.

Le magazine El- Daawa des Frères musulmans publie d'interminables articles contre les coptes, dont l'essentiel est qu'ils doivent « se contenter de leur position privilégiée de dhimmis jusqu'à ce que, bien sûr, ils finissent par voir la lumière et se convertissent à l'Islam », écrit Samuel Tadros.

Au lieu de cela, disait-on « les coptes tentent de changer le visage de l'Égypte en construisant plus d'églises que nécessaire. Les coptes sont une cinquième colonne qui vise à subvertir le pays. Les rumeurs selon lesquelles les coptes stockent des armes se propagent. »

Le jour de l'an 2011, un attentat à la bombe contre l'église des Deux Saints à Alexandrie fait 23 morts et 97 blessés.

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Des fidèles endeuillés lors des funérailles du pape Chenouda III, le 20 mars 2012. Plus d'un million de personnes sont passées devant sa dépouille dans la cathédrale Saint-Marc, au Caire. (Khaled Desouki/AFP)

De nombreuses causes sont à l'origine de la révolution générale qui éclate en Égypte le 25 janvier 2011, mais le sentiment de colère des coptes à l'égard du gouvernement qui a suivi l'attentat à la bombe dégénère rapidement en protestations générales impliquant à la fois des chrétiens et des musulmans.

Le 11 février, Moubarak parti, l'Égypte et « de nombreux coptes sont profondément incertains quant à ce que l'avenir leur réserve », écrit El-Menawy. « L'effondrement général de la loi et de l'ordre qui accompagne la chute de Moubarak n'est certainement pas propice à leur sécurité. »

C'était, ajoute-t-il, « une période dangereuse pour un chrétien en Égypte ».

C'était aussi une triste époque. Le 17 mars 2012, alors que l'avenir de l'Égypte est toujours incertain, le pape Chenouda, dont le pontificat avait été si étroitement lié à la présidence de Moubarak, décède à l'âge de 88 ans.

Le pape copte Tawadros II parlant du véritable motif des attaques contre les coptes.

La mort de Shenouda provoque une onde de chagrin. Plus d'un million de personnes viennent lui rendre hommage dans la cathédrale Saint-Marc du Caire, où son corps est exposé sans linceul. Des messages de condoléances sont envoyés par le pape Benoît XVI et le président américain Barack Obama, et en Égypte, des hommages sont rendus par toutes les grandes factions politiques, du Conseil suprême des forces armées aux Frères musulmans.

En octobre 2012, un petit garçon, les yeux bandés, se tient devant une congrégation bondée dans la cathédrale Saint-Marc du Caire. Après de nombreux prières et hymnes, le garçon dont la main est placée dans un calice en verre, en retire un ruban de papier. Le nom du nouveau pontife, Tawadros, y est inscrit, et toute la cathédrale applaudit et acclame.

« Tawadros est le 118e chef de l'Église », annonce Anba Pachomios, le pape en exercice. « Toutes nos bénédictions et félicitations. »

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Mohamed Mokhtar Gomaa, doyen de la faculté des études islamiques et arabes de l'université Al-Azhar et futur ministre égyptien des Biens religieux, félicite Tawadros II après son intronisation comme pape copte dans la cathédrale Saint-Marc, au Caire, le 18 novembre 2012. (Khaled Desouki/AFP)

C'est à peu près de la même manière que le pape copte est choisi pendant des siècles.

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Sous la présidence d'Hosni Moubarak, le pape Chenouda est rétabli dans ses droits, mais les coptes seront entraînés dans les bouleversements qui suivront son renversement en 2011. (Khaled Desouki/AFP) 

Sous la présidence d'Hosni Moubarak, le pape Chenouda est rétabli dans ses droits, mais les coptes seront entraînés dans les bouleversements qui suivront son renversement en 2011. (Khaled Desouki/AFP) 

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Des fidèles endeuillés lors des funérailles du pape Chenouda III, le 20 mars 2012. Plus d'un million de personnes sont passées devant sa dépouille dans la cathédrale Saint-Marc, au Caire. (Khaled Desouki/AFP)

Des fidèles endeuillés lors des funérailles du pape Chenouda III, le 20 mars 2012. Plus d'un million de personnes sont passées devant sa dépouille dans la cathédrale Saint-Marc, au Caire. (Khaled Desouki/AFP)

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Mohamed Mokhtar Gomaa, doyen de la faculté des études islamiques et arabes de l'université Al-Azhar et futur ministre égyptien des Biens religieux, félicite Tawadros II après son intronisation comme pape copte dans la cathédrale Saint-Marc, au Caire, le 18 novembre 2012. (Khaled Desouki/AFP)

Mohamed Mokhtar Gomaa, doyen de la faculté des études islamiques et arabes de l'université Al-Azhar et futur ministre égyptien des Biens religieux, félicite Tawadros II après son intronisation comme pape copte dans la cathédrale Saint-Marc, au Caire, le 18 novembre 2012. (Khaled Desouki/AFP)

Les ténèbres précédant l'aube

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À la suite du règne d'un gouvernement militaire intérimaire, Mohammed Morsi est élu président de l'Égypte en juin 2012. Il sera destitué en juillet 2013 par un putsch militaire dans la foulée des protestations massives dénonçant son régime islamiste.

En 2014, le pape Tawadros a adressé un message au général Abdel Fattah al-Sissi pour le féliciter de son élection à la tête du pays avec 97 % des voix au terme du coup d'État qu'il a mené. L'élection de M. Al-Sissi, selon le pape, témoignait de «la volonté du peuple». «L'Église prie Dieu de vous aider à surmonter les défis auxquels est confrontée notre patrie et à réaliser les espoirs et les aspirations des Égyptiens», avait-il déclaré.

Le pape comme le président ont assumé leurs responsabilités à une époque marquée par de brusques changements. Les deux hommes prônent ardemment le dialogue interconfessionnel. Al-Sissi sera le premier président à assister à une messe copte en Égypte, à prononcer un discours lors d'une cérémonie de Noël et à souhaiter un joyeux Noël à la congrégation.

Mais la violence ne cessera pas de menacer le pape Tawadros, et avec lui, les Coptes.

Une vague de colère islamiste a suivi le renversement de Morsi: les chrétiens ont été victimes d'actes de vandalisme et de violence. Quarante-trois églises ont ainsi été entièrement démolies et 207 autres propriétés chrétiennes ont été attaquées en août 2013.

En février 2015, un massacre horrible s'est produit sur la côte libyenne. Un crime si atroce que M. Al-Sissi s'est rendu dans la cathédrale copte du Caire pour présenter ses condoléances. Ce jour-là, il a condamné un «acte terroriste odieux» et annoncé un deuil national de sept jours.

Un jour après les décapitations des chrétiens, le président égyptien a ordonné à l'armée de l'air égyptienne d'envoyer des jets F-16 pour frapper des cibles de Daech en Libye..

En 2017, une bombe a explosé à l'église Saint-Pierre et Saint-Paul au Caire. Vingt-neuf personnes ont été tuées. Quelques mois plus tard, lors du dimanche des Rameaux en avril, le pape Tawadros a lui-même été visé par un attentat commis par Daech contre deux églises coptes. Une bombe a frappé l'église de Tanta, une seconde la cathédrale Saint-Marc d'Alexandrie. Si le pape est sorti indemne de l'attentat, 45 personnes ont été tuées et 126 autres ont été blessées.

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Dans un extrait d'une vidéo choquante publiée par Daech le 15 février 2015, les 20 travailleurs coptes migrants capturés en Libye sont conduits vers une plage près de Tripoli pour être mis à mort.

Au mois de mai, un bus de pèlerins qui se dirigeait vers le monastère de Saint-Samuel-le-Confesseur, à 135 km au sud du Caire, a été attaqué par des hommes armés, c coûtant la vie à 28 Coptes et en blessant 25 autres. Des enfants figuraient parmi les victimes.

Une église à Helwan a également été attaquée et 11 personnes ont trouvé la mort à la fin de cette même année.

Ces dix dernières années, l'Égypte a toujours figuré parmi les trois ou quatre pays dont les ressortissants sont les plus nombreux à participer à la loterie de la carte verte américaine. Ce programme, connu officiellement sous le nom de «Diversity Visa Program» est destiné à attirer des immigrants de tous horizons aux États-Unis.

Fadi Mikhail, l’iconographe copte d'origine britannique dont l'art rapproche les cultures.

Il est difficile de connaître le nombre de Coptes parmi les Égyptiens qui s’inscrivent à la loterie. Cependant, leur nombre a considérablement augmenté dans la foulée des attentats de 2017, dépassant le million pour la première fois en 2018. En 2019, ce chiffre est passé à 1,39 million, puis à 1,42 million l'année suivante, un record.

À ce jour, les Égyptiens continuent d’occuper la première place dans la file d'attente des cartes de séjour américaines. En 2021, 11,8 millions de personnes des quatre coins du monde étaient en concurrence pour décrocher les 50 000 visas proposés. Les Égyptiens ont remporté la palme du plus grand nombre de demandes émanant d'un seul pays: 872 505. Cette année-là, le plus grand nombre de cartes vertes délivrées – 6002 – a été attribué à des Égyptiens.

Les événements de 2017 et ceux qui ont suivi ont certes incité certains Coptes à quitter l'Égypte. Mais la peur des persécutions n'a jamais été le seul facteur qui a motivé leur émigration, selon l'anthropologue Candace Loukasik, professeure adjointe de philosophie et de religion à l'université de l'État du Mississippi et chercheuse inaugurale du programme des Études sur les Coptes orthodoxes à l'université Fordham pour l'année 2019-2020.

«L'émigration évolue de façon irrégulière», explique-t-elle. «Elle a connu une hausse après 2011, en 2013 et en 2017. Il est clair que l'incertitude sur l'orientation du pays amène les Coptes à quitter l'Égypte, mais on peut également dire qu'ils aspirent à une vie meilleure», souligne-t-elle.  

De nos jours, on estime à 15 millions le nombre de Coptes vivant en Égypte, soit environ 10 % de la population du pays. Toutefois, pas moins de 2 millions d'entre eux vivent désormais à l'étranger, principalement aux États-Unis, au Canada, en Australie et en Europe.

Les communautés coptes ont prospéré dans tous les pays où elles se sont établies.

Parmi les coptes célèbres, citons le chirurgien cardiothoracique Magdi Yacoub, né en 1935 dans une famille copte à Bilbeis, en Égypte. Après avoir obtenu son diplôme de l'université du Caire, il s'est installé en Grande-Bretagne pour poursuivre sa carrière et est devenu célèbre dans le monde entier pour ses techniques novatrices de réparation des valves cardiaques et de transplantation cardiaque.

L'homme politique et diplomate égyptien Boutros Boutros-Ghali est né au Caire en 1922 dans une famille chrétienne copte. Petit-fils de Boutros Ghali, premier ministre d'Égypte jusqu'à son assassinat en 1910, il a été ministre des affaires étrangères de l'Égypte de 1977 à 1991 et secrétaire général des Nations unies de 1992 à 1996.

Après la mort de Boutros-Ghali dans un hôpital du Caire en 2016, à l'âge de 93 ans, c’est le pape copte, Tawadros II qui dira son oraison funèbre.

Un autre copte qui n'a pas besoin d'être présenté en Occident - bien que ses origines coptes ne soient pas très connues - est l'acteur hollywoodien Rami Malek, star de films dont le plus récent film de James Bond, No Time To Die. Né en Californie, il est le fils de parents coptes orthodoxes qui ont émigré du Caire vers les États-Unis dans les années 1970.

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De nombreux coptes se sont démarqués dans le monde, parmi lesquels l'acteur hollywoodien Rami Malek, né en Californie, fils de parents coptes orthodoxes qui ont migré du Caire vers les États-Unis dans les années 1970. (AFP)

L’église Saint-Marc, première paroisse copte d'Amérique du Nord, a été établie à Toronto en 1964. Une autre paroisse Saint-Marc dans le New Jersey a été fondée peu de temps plus tard, à la fin des années 1960. C'est là qu’a été construite la première église copte en Occident.

Les États-Unis comptent aujourd'hui au moins 197 églises coptes, réparties dans 40 États, et 27 autres au Canada.

C'est dans les années 1950 que l'une des plus anciennes communautés coptes d'Occident a été fondée au Royaume-Uni: la première cérémonie liturgique copte d'Europe a été célébrée à Londres le 10 août 1954.

En 1978, le pape Chenouda III s'est rendu au Royaume-Uni pour consacrer l'église copte orthodoxe de Saint-Marc à Kensington, à Londres. Il s'agissait de la première église copte orthodoxe en Europe.

Depuis, l'église du Royaume-Uni continue de se consolider et compte plus de 20 000 fidèles répartis dans 32 paroisses.

Le 18 août 2002, le pape Chenouda III a également posé la pierre de fondation de la cathédrale Saint-Georges de Stevenage, dans le Hertfordshire; celle-ci a été inaugurée en 2006.

Les icônes éblouissantes qui ornent la cathédrale ont été peintes par Fadi Mikhail. Né en Angleterre, fils de parents coptes qui ont émigré d'Égypte dans les années 70 pour que son père puisse mieux poursuivre sa carrière de médecin, l'art de Mikhail est un pont entre deux cultures.

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Des icônes coptes peintes par le copte d'origine britannique Fadi Mikhail, dont les parents ont émigré dans les années 1970, sont exposées dans des églises en Égypte et à l'étranger.

Il a étudié à Los Angeles sous la direction du célèbre iconographe égyptien Isaac Fanous avant d'être diplômé de la Slade School of Fine Art de Londres. Aujourd'hui, il produit des icônes pour les églises coptes du monde entier et mène parallèlement une carrière d'artiste à succès dans le style occidental. Ses œuvres sont exposées dans des galeries britanniques.

Les Coptes du monde entier sont pour la plupart des professionnels; ainsi, au Royaume-Uni, nombre d'entre eux sont des médecins qui ont choisi de faire carrière à l’étranger plutôt que de se laisser décourager en Égypte. La loterie pour la carte de séjour américaine a quant à elle attiré des candidats coptes plus pauvres issus de la classe ouvrière.

De ce fait, Mme Loukasik estime que « la communauté copte des États-Unis est plus diversifiée du point de vue économique que bien d'autres communautés coptes à travers le monde».

«Ces dix dernières années, le nombre de Coptes qui se sont inscrits à la loterie de la carte verte a augmenté, et je dirais même que ce ne sont pas eux qui s'en occupent. Je me suis entretenue avec de nombreuses communautés (en Haute-Égypte) qui m'ont confié que des églises avaient inscrit toute leur congrégation à la loterie».

Michael Akladios conteste l'hypothèse selon laquelle l'émigration des Coptes d'Égypte serait motivée dans son ensemble par la peur ou la persécution. Il n'avait que huit ans lorsque sa famille a émigré au Canada. Ils ont rejoint les frères et sœurs de son père qui s'étaient déjà installés à Toronto. Ils ont fait ce choix pour des raisons économiques.

«De plus en plus de personnes se déplacent à travers le monde; les jeunes coptes professionnels ne dérogent pas à la règle», affirme-t-il.

La génération précédente comptait des jeunes qui «avaient fait leur doctorat au Royaume-Uni ou en Suisse (dans les années 1950), et d’autres en Union soviétique ou en République tchèque (dans les années 1960). Ceux-ci sont ensuite retournés en Égypte avant d'émigrer définitivement à New York ou à Toronto. Les migrations ont toujours été complexes et motivées en grande partie par la situation économique», explique M. Akladios

«La persécution joue certes un rôle dans ce mouvement. Pourtant, nous devons admettre, à mon avis, que lorsqu'on parle des Coptes, on ne parle pas seulement de leurs églises; ce sont des êtres humains qui ont des besoins, des familles, des soutiens et des réseaux. Ils prennent des décisions de façon pragmatique, comme n'importe quels autres migrants», ajoute-t-il.

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Dans un extrait d'une vidéo choquante publiée par Daech le 15 février 2015, les 20 travailleurs coptes migrants capturés en Libye sont conduits vers une plage près de Tripoli pour être mis à mort.

Dans un extrait d'une vidéo choquante publiée par Daech le 15 février 2015, les 20 travailleurs coptes migrants capturés en Libye sont conduits vers une plage près de Tripoli pour être mis à mort.

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De nombreux coptes se sont démarqués dans le monde, parmi lesquels l'acteur hollywoodien Rami Malek, né en Californie, fils de parents coptes orthodoxes qui ont migré du Caire vers les États-Unis dans les années 1970. (AFP)

De nombreux coptes se sont démarqués dans le monde, parmi lesquels l'acteur hollywoodien Rami Malek, né en Californie, fils de parents coptes orthodoxes qui ont migré du Caire vers les États-Unis dans les années 1970. (AFP)

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Des icônes coptes peintes par le copte d'origine britannique Fadi Mikhail, dont les parents ont émigré dans les années 1970, sont exposées dans des églises en Égypte et à l'étranger.

Des icônes coptes peintes par le copte d'origine britannique Fadi Mikhail, dont les parents ont émigré dans les années 1970, sont exposées dans des églises en Égypte et à l'étranger.

Quelle nouvelle république?

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M. Al-Menawi écrit qu’en dépit des problèmes rencontrés, «l'Égypte reste pour les coptes le seul endroit où ils peuvent vivre et où ils resteront, tout comme leurs enfants et leurs descendants pour des siècles à venir».

Il conclut par ces mots: «Peu importe ce que l'avenir réserve à l'Église copte, les Coptes continueront de jouer un rôle essentiel dans le christianisme dans le monde actuel, tout comme ils constituent un élément incontournable de la culture, de l'histoire et de la nation égyptienne».

L'archevêque Angealos: Aimez vos ennemis

Cette approche semble s'imposer de plus en plus au cœur de l'État égyptien, huit ans après l'arrivée d'Al-Sissi à la présidence. Les messages et les initiatives en faveur de l'inclusion interconfessionnelle que transmettent les dirigeants ont suscité d'importantes manifestations de fraternité œcuménique.

Le grand mufti d'Égypte, Shawki Allam, a promulgué en janvier 2021 une fatwa autorisant les musulmans à travailler à la construction d'églises chrétiennes comme ouvriers rémunérés.

Le mois suivant, la paroisse copte de Qena a versé des fonds pour l'achèvement de la mosquée Al-Nouamani à Deshna, qui jouxte la cathédrale copte orthodoxe Saint-Georges.

Le 6 janvier 2022, le président égyptien s'est joint au pape Tawadros pour la messe de Noël dans la cathédrale de la Nativité du Christ, dans la nouvelle capitale administrative de l'Égypte. Ce jour-là, le président a prononcé un bref discours dans lequel il a évoqué une «nouvelle République» en Égypte, «qui intègre tous les citoyens sans discrimination».

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Sous l'égide du pape Tawadros II, que l'on voit ici avec le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane lors de sa visite à la cathédrale copte orthodoxe Saint-Marc du Caire en mars 2018, l'Église copte a progressivement œuvré à nouer des amitiés avec des dirigeants de toutes les confessions.

Cette République, a-t-il ajouté, reposera sur «les rêves, les aspirations, la science et le travail» et sera «construite par tous les Égyptiens».

En effet, les Coptes ont fêté un moment qui pourrait s'avérer décisif, un mois plus tard: le premier chrétien copte a été nommé à la tête de la Cour suprême constitutionnelle d'Égypte, la plus haute autorité judiciaire du pays.

Le Conseil national des droits de l'Homme égyptien a salué la nomination du juge Boulos Fahmi Eskandar, annoncée le 9 février 2022. Il l'a qualifiée de «grande avancée historique dans le domaine des droits civils et politiques, accordant à tous les Égyptiens tous leurs droits sans aucune discrimination».

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Lors d'une visite au Vatican en avril 2017, le pape Tawadros II a signé une déclaration conjointe avec le pape François, s'engageant à «lutter pour la sérénité et la concorde à travers une cohabitation pacifique des chrétiens et des musulmans». (AFP)

Michael Akladios estime que la nomination par Al-Sissi d'un Copte à la tête du tribunal depuis sa création en 1969 marque «une étape prometteuse sur la voie de l'inclusion et de la représentation des Coptes dans la vie publique égyptienne».

Il est encore «trop tôt pour évaluer les conséquences de cette nomination pour les communautés Coptes d'Égypte et de ses diasporas», explique-t-il. Elle est néanmoins «significative des grandes initiatives continues que prend l'État pour consolider l'unité nationale et en faire une caractéristique prédominante de la nation.

La nouvelle a été accueillie avec beaucoup de joie dans la communauté».

À travers le monde, les Coptes suivent les événements en Égypte avec un optimisme réservé. L'archevêque Angaelos, chef de l'Église au Royaume-Uni, en est un exemple.

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Le pape Tawadros et l'évêque Angaelos de l'église copte de Grande-Bretagne rencontrent la reine Elizabeth II lors d'une audience privée au château de Windsor en mai 2017. (Getty Images)

Né au Caire en 1967,  il a émigré avec sa famille en Australie alors qu'il était enfant. Il y a obtenu un diplôme en sciences politiques, en philosophie et en sociologie. Il est retourné en Égypte en 1990, après avoir obtenu un diplôme en droit. Il y a rejoint le monastère historique de Saint Bishoy à Wadi el-Natroun.

Secrétaire du pape Shenouda, son «père spirituel», jusqu'en 1995, il a été affecté cette année-là au Royaume-Uni comme prêtre de paroisse. En 1999, il a été désigné comme évêque général de l'Église copte orthodoxe et le 18 novembre 2017, a été intronisé comme premier archevêque copte orthodoxe de Londres.

Selon lui, les fidèles sont à ce jour confrontés à des «défis». «Mais l'une des plus belles réussites pour les Coptes aujourd'hui, aussi bien en Égypte qu'à l'étranger, c'est la cohabitation plus harmonieuse entre chrétiens et musulmans observée ces dix dernières années».

Il assure que les Coptes ont salué les gages de fraternité du gouvernement égyptien, comme lorsqu'Al-Sissi s'est joint à la foule pour la messe de Noël dans la cathédrale de la Nativité du Christ en janvier.

«Les beaux gestes sont certes agréables», a-t-il déclaré, «mais ils ne rassurent guère les gens». Ce qui les a davantage confortés, ce sont les actions concrètes dont ils ont été témoins. Par exemple, les églises ont été construites illégalement en Égypte pendant des décennies. Leur construction est désormais en passe d'être régularisée et légitimée.

«Nous avons vu une plus grande ouverture envers l'Église; nous avons vu le président et les hauts fonctionnaires du gouvernement s'employer à changer la façon dont le pays est gouverné, et ces efforts ont porté leurs fruits.»

Pour l'archevêque Angaelos, l'acceptation des Coptes comme partenaires égaux dans la «nouvelle République bâtie par tous les Égyptiens» prônée par Al-Sissi sera finalement fructueuse pour tout le peuple.

«Nous sommes tous persuadés qu'une nation qui respecte les libertés et l'ensemble de sa population est une nation prospère, car elle s'appuie sur les dons et les capacités de tous ses habitants, sans en privilégier une seule composante», déclare-t-il.

«Force est de reconnaître que l'Égypte deviendra encore plus prospère à mesure qu'elle s'ouvrira à tous, qu'elle responsabilisera et protégera tous ses citoyens sans discrimination. Tout le monde en profitera.»

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Sous l'égide du pape Tawadros II, que l'on voit ici avec le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane lors de sa visite à la cathédrale copte orthodoxe Saint-Marc du Caire en mars 2018, l'Église copte a progressivement œuvré à nouer des amitiés avec des dirigeants de toutes les confessions.

Sous l'égide du pape Tawadros II, que l'on voit ici avec le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane lors de sa visite à la cathédrale copte orthodoxe Saint-Marc du Caire en mars 2018, l'Église copte a progressivement œuvré à nouer des amitiés avec des dirigeants de toutes les confessions.

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Lors d'une visite au Vatican en avril 2017, le pape Tawadros II a signé une déclaration conjointe avec le pape François, s'engageant à «lutter pour la sérénité et la concorde à travers une cohabitation pacifique des chrétiens et des musulmans». (AFP)

Lors d'une visite au Vatican en avril 2017, le pape Tawadros II a signé une déclaration conjointe avec le pape François, s'engageant à «lutter pour la sérénité et la concorde à travers une cohabitation pacifique des chrétiens et des musulmans». (AFP)

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Le pape Tawadros et l'évêque Angaelos de l'église copte de Grande-Bretagne rencontrent la reine Elizabeth II lors d'une audience privée au château de Windsor en mai 2017. (Getty Images)

Le pape Tawadros et l'évêque Angaelos de l'église copte de Grande-Bretagne rencontrent la reine Elizabeth II lors d'une audience privée au château de Windsor en mai 2017. (Getty Images)

Crédits

Scénariste: Jonathan Gornall
Recherche: Alex Webster, Leen Fouad
Éditrice version franҫaise: Zeina Zbibo
Directeur créatif: Simon Khalil
Designer: Omar Nashashibi
Graphisme: Douglas Okasaki
Producteur vidéo: Mohammed Qenan
Monteurs vidéo: Hasenin Fadhel
Recherche d'images: Sheila Mayo
Traduction: Arab News en franҫais
Éditeur version anglaise: Tarek Ali Ahmad
Réseaux sociaux: Jad Bitar
Producteur: Arkan Aladnani
Rédacteur en chef: Faisal J. Abbas

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